[TRIBUNE] Insécurité : Le gouvernement Barnier sera-t-il un clone macroniste ?

Capture écran LCP
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Ce mardi, Michel Barnier a obéi à la tradition républicaine (tradition, car rien dans la Constitution n’oblige le gouvernement à le prononcer) en prononçant son discours de politique générale devant les députés à l’Assemblée nationale.

Pendant une heure, il a balayé tous les sujets, et notamment celui qui intéresse plus particulièrement votre serviteur (et beaucoup de Français) : la justice et la sécurité.

En la matière, les attentes citoyennes sont en effet très fortes. En avril dernier, un sondage Le Figaro annonçait que 92 % des Français estiment que l’insécurité progresse. Une quasi-unanimité qui démontre l’urgence du problème.

Pourtant, s’il ne contient pas de mauvaises mesures, le discours de politique générale nous en apprend bien peu sur la façon dont le gouvernement compte régler le problème.

Le retour du politiquement correct macronien ?

La « sécurité du quotidien » est le « troisième chantier » cité par Michel Barnier. Le Premier ministre a ainsi annoncé « plus de bleu dans la rue », sur le modèle du travail de Gérald Darmanin pendant les Jeux olympiques. C’est une bonne mesure pour faire diminuer l’insécurité, mais qui agit davantage comme un sparadrap que comme une solution de fond. Qui, en effet, veut vivre dans une société ultra-sécurisée alors qu’il suffirait d’enfermer ou d’expulser les délinquants suractifs ?

Également cité par Michel Barnier, l’allègement de la procédure pénale est également une bonne mesure, mais extrêmement floue à ce stade. Rien n’est moins simple qu’alléger un Code pénal et un Code de procédure pénale que les réformes successives ont rendu illisibles.

Autre sujet récurrent, en matière de justice : la justice des mineurs. L’occupant de l’hôtel de Matignon a annoncé la réduction des délais de jugement pour les mineurs, mesure qui pose question puisque Éric Dupond-Moretti était censé avoir réglé le problème avec la création du Code de la justice pénale des mineurs. Citons, encore, l’atténuation de l’excuse de minorité, une mesure qui n’est que symbolique, déjà annoncée par le gouvernement Attal, et qui n’aura aucun effet concret. Aucun mineur n’est condamné à la moitié de la peine maximale prévue pour un majeur, alors le plafond pourrait être de la perpétuité, pour chaque infraction, cela ne changerait rien.

Enfin, le Premier ministre cite la construction de places de prison, qui est en effet fondamentale pour mettre en place la moindre politique pénale digne de ce nom. En l’occurrence, les gouvernements précédents portent une lourde responsabilité dans la situation actuelle ; ce qu’a noté, à raison, Michel Barnier.

L’imprécision comme feuille de route…

Un discours de politique générale n’a pas vocation à entrer dans les détails, mais l’impression générale qui ressort de ce discours tend tout de même à une impression de flou. Les mesures sont particulièrement imprécises, plusieurs sont presque inutiles (comme l’atténuation de l’excuse de minorité) et certaines titanesques (la réduction des formalités policières).

Mais, au-delà de l’imprécision, c’est surtout l’impression de déjà-vu qui peut inquiéter. En effet, si Édouard Philippe n’abordait que du bout des lèvres le sujet de l’insécurité dans son discours de 2017, Élisabeth Borne y consacrait des développements équivalents, tant en termes de longueur que… sur le fond.

Cette dernière prévoyait d’ajouter du bleu dans les rues, contre les « zones blanches de sécurité » et « en allégeant les procédures ». Elle prétendait également agir « pour que chaque peine prononcée soit exécutée ». Le gouffre entre les intentions et la réalité est béant…

L’argument du peu de temps laissé à Élisabeth Borne ne tient d’ailleurs pas, puisque Emmanuel Macron avait déjà promis la même chose en 2017 puis en 2018, appelant, sur X, à ce « qu'une peine prononcée soit une peine effectuée »

Sous Emmanuel Macron, les experts en communication ont pris le contrôle de l’action politique. Ce n’est pourtant pas de communication que la France a besoin, mais d’une « révolution pénale », pour reprendre les mots si justes du ministre de l’Intérieur. Le temps est-il enfin venu ?

Pierre-Marie Sève
Pierre-Marie Sève
Directeur de l'Institut pour la Justice

Vos commentaires

3 commentaires

  1. Sans le moindre doute. Lorsque Macron avait fait sa première campagne en 2017, j’avais tout de suite dis que c’était un dangereux bonhomme qui nous mènerait au désastre. J’étais alors le sale petit mouton noir. Je dis aujourd’hui que Barnier ne nous meneras pas au désastre puisque nous y sommes déjà, mais il ne nous en sortira pas et ne pourra pratiquement rien faire car toujours sous la domination incontournable de macron qui ne lache rien. Il fait semblant de laisser la bride sur le cou à Barnier mais en douce, avec l’aide de ses anciens ministres devenus députés, il continuera de diriger la France. La preuve, il a imposé un gouvernement pléthorique avec 70% d’inutiles ou d’éléments de son bord qui contraindront les ministres qui se veulent efficaces. Un aux finances qui est symbole de nullité, un autre du même type à la justice, et on peut faire le tour. On ne sort pas du Fech-fech en tirant le camion avec de la ficelle à gigots.
    Pour s’en sortir, il nous faut l’élimination totale et complète de toutes les anciennes figures politiques, et la déclaration de dissolution d’une grande partie de la gauche, mais aussi de certains de droite qui passent leur temps à rêver à « de gaulle » au lieu de regarder l’avenir.

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