[TRIBUNE] Parlement européen : l’anglais étouffe la voix des peuples

©Gzen92/Wikimedia commons
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Les européistes s’enorgueillissent que le multilinguisme soit le socle fondamental de la construction européenne, un principe inscrit dans les traités, censé garantir l’égalité entre les langues et donc entre les citoyens européens. Pourtant, la réalité du Parlement européen et des institutions européennes est tout autre : l’anglais y domine outrageusement, marginalisant les autres langues officielles, en particulier le français. Cette hégémonie est non seulement injuste, mais elle constitue également une atteinte à la démocratie et à l’indépendance de nos institutions.

Le multilinguisme sacrifié au profit du tout-anglais

On l’oublie mais à l’origine, l’Europe parlait français. Langue diplomatique, langue des pères fondateurs, le français occupait la première place centrale dans les institutions. Mais au fil des années et des élargissements, sous l’œil indifférent, voire complice des élites françaises, l’anglais s’est imposé comme la langue dominante.

Les chiffres sont accablants : entre 1999 et 2019, les documents produits par la Commission européenne ayant le français pour langue source sont passés de 34 % à 3,7 %. Quand l’anglais domine avec 85 % des documents. Le Parlement européen suit la même tendance : en 2019, seuls 11,7 % des documents avaient pour langue source le français, comme le souligne le rapport Lequesne.

Cette évolution est d’autant plus absurde que l'anglais est aujourd’hui la langue officielle d’à peine 1 % des citoyens européens depuis le Brexit. Pourquoi imposer à tous les Européens la langue d’une puissance extérieure alors qu’il existe une richesse linguistique inégalée parmi les États membres ?

Le recul du français s’explique par maintes raisons mais la faiblesse du multilinguisme trouve son origine dans le manque de volonté politique pour le défendre et par la facilité du tout-anglais. Pour les élites mondialistes, le choix de l’anglais est avant tout politique. Élue par des Français, la tête de liste Renew Valérie Hayer aime à s’exprimer devant tout le Parlement en anglais. Mais lorsque l’on ne défend pas sa propre langue, comment peut-on défendre son peuple ?

Un problème démocratique et culturel majeur

Le recul du multilinguisme au profit de l’anglais pose un problème démocratique évident :

L’anglais n’est pas la langue du peuple européen (quand bien même il existerait). Pour une écrasante majorité de députés et citoyens européens, il s’agit d’une langue étrangère d’un État qui a choisi démocratiquement de quitter l’UE. Une langue est l’instrument de l’expression démocratique. Le tout-anglais défavorise donc l’exercice démocratique en empêchant les représentants du peuple de s’exprimer et de travailler dans leur langue maternelle. Combien de réunions de commissions ont été organisées sans interprétation ? Combien de rapports ne sont disponibles qu’en anglais ? Combien de fois n’avons-nous pas eu la traduction en français d’un document sur lequel le vote aura lieu dans quelques heures ?

Les citoyens européens, notamment les francophones, voient leurs identités culturelles et linguistiques reléguées au second plan, ce qui renforce le fossé entre l’Union européenne et ses peuples.

Le multilinguisme, en assurant l’égalité des langues, est pourtant un rempart contre l’uniformisation et la domination économique et culturelle anglo-saxonne. À l’inverse, l’hégémonie de l’anglais favorise la propagation de l’influence américaine dans nos institutions, y compris sur le plan juridique. La langue n’est pas un simple outil de communication : c’est un vecteur de culture, de pensée et d’influence. L’Union européenne, en sacrifiant ses langues nationales, sacrifie également son indépendance culturelle et politique.

Le potentiel du français : une langue mondiale au service de l’Europe

Contrairement à ce que certains voudraient faire croire, le français n’est pas une langue en déclin. Bien au contraire :

  • Le français est parlé sur tous les continents par plus de 300 millions de locuteurs.
    Selon les projections, le français pourrait devenir l’une des langues les plus parlées au monde d’ici 2050 avec à la croissance démographique en Afrique francophone.
  • La langue de Molière et de Montesquieu incarne une tradition littéraire et intellectuelle qui a marqué l’Histoire. Porteur d’une richesse lexicale et d’une précision unique, il est le véhicule d’idées, de valeurs et de créations qui ont façonné la culture européenne et mondiale.

Langue officielle de nombreuses organisations internationales, dont la CJUE, l’ONU et l’UNESCO, elle est perçue comme un symbole d’élégance, de culture et d’excellence intellectuelle. Dans de nombreuses régions du monde, apprendre le français reste une aspiration liée à l’accès à la culture, à la diplomatie et à la science. Renforcer son rôle au sein des institutions européennes, c’est non seulement préserver notre diversité culturelle, mais aussi affirmer la place de l’Europe dans le concert des nations.

Lors d’une visite à la Cité internationale de la Francophonie à Villers-Cotterêts, en compagnie d’une délégation d’élus patriotes, nous avons pu constater que la langue française est bien plus qu’un outil de communication : c’est un instrument de rayonnement culturel et international, qui pourrait être mis au service d’une Europe indépendante et souveraine.

Pourquoi l’Union européenne ne s’appuie-t-elle pas davantage sur cette langue mondiale, parlée par des millions d’Européens, pour promouvoir son indépendance face aux influences extérieures ?

Des solutions concrètes pour rétablir le multilinguisme

Le Parlement européen et la Commission doivent engager un véritable effort pour rétablir l’égalité entre les langues officielles. Cela passe par des actions à la fois simples et ambitieuses mais toujours concrètes :

  1. Revaloriser les services de traduction et d’interprétariat pour garantir que chaque député puisse s’exprimer et travailler dans sa langue maternelle.
  2. Mettre fin au tout-anglais dans les réunions de travail et assurer systématiquement une interprétation multilingue.
  3. Traduire toutes les pages de tous les sites des institutions européennes afin d’assurer aux citoyens un accès aux informations dans sa langue.
  4. Redonner au français sa place historique en augmentant le nombre de documents rédigés en français et en promouvant activement son usage dans les débats.
  5. Rappeler que le multilinguisme est un principe démocratique, garant de l’égalité entre les citoyens européens et de la diversité culturelle du continent.
  6. Développer des outils d’intelligence artificielles pour accélérer considérablement le processus de traduction.

J’ai pour cela fait un certain nombre de démarches afin d’alerter mes collègues et les institutions : saisie de la Commission européenne, lettre à la présidente du Parlement européen, proposition de résolution, mais également des vidéos de communication.

Défendre nos langues, c’est défendre notre démocratie

L’Union européenne ne peut se prétendre démocratique si elle relègue ses langues nationales au second plan. Le multilinguisme est une exigence démocratique et un impératif culturel. Le recul du français, au profit de l’anglais, est le symptôme d’une Europe qui perd ses repères et se laisse influencer par des puissances extérieures.

Il est temps de réagir et de défendre la place du français et des autres langues officielles au sein des institutions européennes. C’est un combat pour la démocratie, la (véritable) diversité culturelle et la souveraineté de l’Europe et de ses Nations.

Au Parlement européen, je continuerai à me battre pour que le multilinguisme redevienne une réalité et que la voix des peuples européens soit enfin entendue dans toutes leurs langues.

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Catherine Griset
Député RN au Parlement européen, groupe Patriotes pour l'Europe

Vos commentaires

3 commentaires

  1. L’Anglais est très largement adopté car c’est une langue facile. Par contre le Français est « compliqué », et pour qu’il le soit encore plus on a abandonné le neutre. Autrefois on disait les « personnes » qui….c’était simple. Mais maintenant il faut dire : « les hommes et les femmes » qui….ou bien « cellezéceux », sinon on est attaqués par les féministes. Et puis on a inventé l’écrire inclusive pour rendre le Français tout à fait imbuvable !

  2. Cocorico, mais il faut déja commencer par la France. Quand on entand à la télévision des journalistes ou autres biensur, dirent « job » pour ne pas dire « travail », « fake news » au lieu d’ « intox » etc…C’est vrai que c’est dur à dire en Français!

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