[Tribune] Retraites : une faute politique du Président Macron et des Républicains

Voilà comment Emmanuel Macron, expert en gestion des peurs, peut se justifier de maintenir cette réforme injuste et incomprise par les Français.
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Emmanuel Macron, par bravade et pour obéir benoîtement à Bruxelles, a relancé une réforme des retraites qui s’avère particulièrement impopulaire. Ce projet politique n’avait aucune urgence pour 2023. Le régime des retraites n’est pas fondamentalement en danger pour les toutes prochaines années. Les réserves accumulées permettent de faire face à la prochaine décennie. On pourrait réformer en douceur, si tant est que cela soit nécessaire – ce qui est discutable –, tant les estimations du Conseil d'orientation des retraites peuvent être sujettes à discussion.

Alors pourquoi, dans ce contexte, s’évertue-t-il à poursuivre cette réforme ?

Tout d’abord, on ne comprendra jamais Emmanuel Macron si on oublie son parcours, celui d’un homme à qui tout avait réussi, si on considère que la réussite matérielle est ce qui compte le plus dans la vie. Plus jeune associé chez Rothschild, il avait tout obtenu, la reconnaissance du milieu financier et des rémunérations record. Plus jeune ministre de l’Économie de la Ve, devançant d’une année Valéry Giscard d’Estaing, il fut le plus jeune président de la République. Pour lui, un échec est un échec personnel - ce qu’il ne supporte pas. Quand il décide, cela doit se faire !

Qu’importe si les Français ne comprennent pas les efforts qu’il veut imposer ! Qu’importe si les Français subissent, dans cette période, des dépenses faramineuses : 900 millions d’euros pour l'Afrique du sud, près de 3 milliards prêtés ou donnés à l’Ukraine, 55 milliards promis pour les nouvelles centrales nucléaires (les six EPR), 100 milliards annoncés pour le ferroviaire, 400 milliards annoncés de hausse du budget des armées… Ces dépenses pharaoniques, dont certaines sont bien évidemment indispensables, sont ressenties comme autant de mépris par les Français qui arrivent de plus en plus difficilement à boucler leurs fins de mois, avec la hausse du coût de l’énergie, des carburants et, désormais, de l’alimentation.

D’autant qu’on évacue sans débats la réforme des régimes spéciaux des parlementaires ou même celle des fonctionnaires. La retraite des fonctionnaires, calculée sur les six derniers mois de salaire, choque tout salarié, artisan ou profession libérale à qui on retient les vingt-cinq meilleures années comme base de calcul. La soudaineté de l’application de la mesure fait réagir des Français qui auraient mieux accepté une réforme étalée sur de nombreuses années. De la même manière, on évacue le problème de la disparition de l’emploi industriel, l’absence de politique démographique…

Ainsi, cet amalgame de protestations n’attendait qu’un prétexte pour exploser et Emmanuel Macron, par son comportement et son mépris permanent, a fourni cette occasion !

Mais cette réforme fait des dégâts collatéraux (ce qui n’est sans doute pas pour déplaire au Président Macron, à tel point qu’on peut en venir à se demander si cela ne fait pas partie de sa stratégie) ! Il enferme directement les LR dans ce piège. Par souci de récupérer un électorat centriste (parti, depuis belle lurette, chez Renaissance), « la droite et le centre » espèrent séduire une frange de Français qui ne se sentent pas particulièrement concernés par cette réforme, une population aisée, éloignée des « gilets jaunes » et des autres Français exclus ou malmenés.

Serait-ce une volonté de plus de détruire toute tentative de renouveau d’un ancien parti à droite, après avoir fait exploser en vol l’ancien PS ? L’espérance, qu’ont certains LR, de pouvoir profiter d’une recomposition du paysage politique, à la prochaine élection présidentielle, leur fait miroiter une place qu’ils pensent voir se dessiner. C’est le miroir aux alouettes qui sévit une fois de plus car, à force de s’éloigner de son ADN d’origine, on en vient à perdre son âme.

Seuls les partis de droite, gaulliste comme DLF, de la droite populaire comme le RN ou gauchiste voire extrémiste comme LFI ou le PC se sont opposés clairement à cette réforme considérée comme injuste et inadaptée. Ils seront les force politiques qui compteront dans les années à venir car les électeurs n’oublieront jamais les votes exprimés à l’Assemblée puis, bientôt, au Sénat. Ces votes, scrutés avec attention, seront décisifs à l’avenir.

Voilà comment Emmanuel Macron, expert en gestion des peurs, peut justifier le maintien de cette réforme incomprise par les Français. Il aura gagné et détruit ce qui reste des LR, les ramenant au niveau groupusculaire du PS, à moins qu’un sursaut ne les amène à s’opposer à cette réforme.

Ils peuvent le faire d’autant plus que, contrairement aux affirmations mensongères soutenues éhontément par le gouvernement, cette réforme n’apportera jamais une retraite minimale à 1.200 euros pour tous. Au mieux, la nouvelle pension restera un peu supérieure au minimum vieillesse, cette allocation de solidarité aux personnes âgées, ASPA (953,45 euros), qui est également accordée à tout étranger n’ayant jamais travaillé en France ! Quelle générosité avec l’argent des générations futures ! Et, surtout, quel mépris envers la valeur travail qu’Emmanuel Macron affirme pourtant vouloir réhabiliter, comme il a osé le rappeler lors de sa visite de Rungis ou du Salon de l’agriculture !

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Gerbert Rambaud
Avocat, vice-président de Debout la France

Vos commentaires

34 commentaires

  1. En clair, nous sommes dirigés par un « illuminés » ébloui par son ego surdimensionné.
    Ceci étant, j’aimerais rappeler dans cette guerre entre public/privé sur fond de retraite, que le calcul de retraite des fonctionnaires se fait effectivement sur la base des 6 derniers mois mais que n’est pas pris en compte dans ce calcul le montant des primes qui peut monter jusqu’à 30% du salaire perçu. Ex-fonctionnaire, je suis surpris que jamais cet élément ne soit pris en compte et expliqué dans les médias.

    • D’où la nécessité d’arrêter de distinguer artificiellement la fonction publique du privé.

  2. Tout échec est une victoire …tant qu’il n’aura pas compris cela il restera imbu de lui même égocentré et arrogant .

  3. Désolé Maître , mais cette réforme est mathématiquement nécessaire, dire le contraire est vraîment mentir aux français, je vous rassure je suis totalement opposé à Macron, mais on ne peut nier les évidences.

  4.  » Plus jeune ministre de l’Économie de la Ve », mais le pire…
    Macron veut la réforme des retraites pour rassurer les marchés financiers. Ainsi, la France pourra continuer à emprunter à des taux pas très élevés et notre président pourra continuer ses dépenses et ses aumônes somptueuses à l’étranger extérieur, à l’étranger intérieur. Du pognon, en veux-tu, en voilà, jusqu’au jour où tout craquera, où notre pays sombrera, à cause de ce Crésus de papier ; et les pauvres Gaulois n’auront plus que leurs yeux pour pleurer.

  5. Pourquoi construire 6 EPR si c’est pour vendre l’électricité à prix coutant et la racheter au prix du gaz?

  6. Macron n ‘est que le pion de l ‘ UE et il est impératif pour lui de faire passer cette réforme s ‘ il veut garder sa place ; si ce n ‘ était pas le cas , ce bel échec cuisant lui ferait du bien et nous avec ;
    Quant aux LR , ils se sont détruits tout seuls et il impossible de compter sur eux .

  7. Macron n ‘est que le pion de l ‘ UE et il est impératif pour lui de faire passer cette réforme s ‘ il ne veut pas perdre sa place ; si c ‘ était le cas , ce bel échec bien cuisant lui rabattra

  8. Les LR se sont détruit tout seul . Le français veut une égalité dans le calcul des retraites , stop à ces régimes spéciaux , stop aux privilèges des élus et ex élus et surtout stop aux retraites de ceux qui n’ont jamais contribué à l’essor de ce pays .

  9. Emmanuel Macron obéit à la commission européenne comme vous l’écrivez au début de votre article.

    Les partis politiques qui s’opposent véritablement à la réforme des retraites sont ceux qui veulent sortir de l’union européenne et qui veulent que la France reprenne sa souveraineté.

  10. La retraite des fonctionnaires, calculée sur les six derniers mois de salaire, choque tout salarié, artisan ou profession libérale à qui on retient les vingt-cinq meilleures années comme base de calcul.

    Nivellement par le bas.

    • La retraite des fonctionnaires ne comprend pas le montant des primes or une grosse partie des rémunérations est constituée par des primes ce qui fait que les retraites des fonctionnaires sont quasi identique à celles du privé.

    • La carrière des fonctionnaires est très différente de celle du privé, d’où le calcul différent. Une secrétaire retraitée du privé et une secrétaire fonctionnaire à la fin de leur carrière ont des pensions comparables. Je suis favorable aux régimes spéciaux et opposé à l’application d’un même calcul pour tous. L’uniformisation ne profite qu’aux gestionnaires qui verront leur travail très simplifié et , par conséquence, le nombre de leurs employés en chute.

      • Pas forcément, regardez les modifications sur les Régions de France : cela devait réduire le nombre des fonctionnaires et en fait c’est le contraire qui s’est passé en créant des doublons inutiles

  11. Il me semble que vous surestimez le génie machiavélique de Macron, les LR n’ont pas eu besoin de lui pour s’autodétruire.
    Le programme de Pécresse affichait clairement la retraite à 65 ans et sur de nombreux sujets, il était parfaitement compatible avec celui de Macron. On peut même penser que, si elle n’avait pas fait un score ridicule, elle serait devenue sa première ministre.
    On serait en droit d’attendre des LR qu’ils soient vent debout contre les ZFE ou la fin du moteur thermique. Il n’en est rien, leur seul souci est de montrer qu’ils sont contre le RN…

  12. Un directeur nommé et non élu qui cristalise la haine. Seuls les français qui vivent en France peuvent comprendre , les autres n’étant que de beaux parleurs, heureux admirateurs d’une France qu’ils disent à genoux aspirant pour elle a une cure de thatcherisation sous prétexte qu’à l’étranger c’est toujours mieux sachant aussi que par faiblesse ils acceptent tout, meme travailler jusqu’a 68 ans si Bruxelles ou les banques l’exigent ce qui revient a supprimer les retraites. Macron le fossoyeur remplit son contrat , la victime c’est la France, les coupables une grosse partie des électeurs et abstentionnistes. Cette réforme n’a pas lieu d’être elle ne satisfait que les faibles et les admirateurs du liberalisme exacerbé.

  13. c’est le 26 mars qu’il faudra lui rappeler que le président n’est pas le « roi soleil » lors de l’invitation du benêt du Royaume Uni, tous à Versailles

    • Pourquoi benêt? Vous voilà bien méprisant envers Charles III. Ayant vécu longtemps au RU, sachez qu’il est très populaire et qu’il a beaucoup œuvré pour la qualité de l’agriculture anglaise, contre les importations de « vache enragée » (fièvre aphteuse) d’autres continents et la réparation des dégâts causés par les pratiques ayant amené la « vache folle ». Tout ceci en fondant aussi, sur ses fonds propres, une marque (Duchy) de produits alimentaires d’excellente qualité sans prendre en retour un quelconque profit, tout étant reversé au développement agricole. On aimerait que l’agriculture française soit pareillement défendue. Tout sauf benêt en fait; vous faites abusivement de votre mauvaise considération pour lui (des raisons tangibles hormis peut-être une anglophobie atavique?) une acceptation générale.

      • Savez-vous que Charles reçoit la plus importante dotation de la PAC ? Propriétaire de milliers d’hectares de terres agricoles, c’est le plus gros « fermier » du Royaume Uni.

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