[TRIBUNE] : Suicides dans la police : décréter l’état d’urgence
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J’ai, par le passé, souvent écrit sur le suicide des policiers. Y compris dans les colonnes de Boulevard Voltaire. Ce sujet important qui a jalonné toute ma vie professionnelle connaît, en ce début d’année 2022, un rebondissement sans précédent. Car ce sont pas moins de 12 policiers qui, en l’espace d’un mois, ont mis fin à leurs jours. Un suicide toutes les 60 heures ! Du jamais-vu.
Face à ce phénomène majeur pour l’institution policière, sur lequel les syndicats et les associations de policiers attirent l’attention de l’administration depuis de très nombreuses années, cette dernière semble n’avoir jamais réellement pris conscience de l’ampleur du drame. Traité par des mesurettes ponctuelles consistant à recruter, ici ou là, quelques psychologues supplémentaires ou bien en ouvrant des numéros de téléphone dédiés, l’État a toujours considéré que c’était à la hiérarchie intermédiaire de s’emparer du problème et de trouver des solutions pérennes. Bien entendu, cela n’a jamais fonctionné et l’on se trouve désormais face à un véritable drame humain.
Nous le savons, les causes d’un suicide sont toujours multifactorielles et complexes. Mais l’on sait aussi que l’environnement professionnel est déterminant et qu’il est souvent le dernier rempart pour celle ou celui qui, rencontrant des difficultés dans sa vie personnelle, passera à l’acte dès lors que cet ultime bouclier s’effondrera. À l’inverse, un climat délétère au sein du service pourra rapidement devenir la cause d’un geste irréparable s’il est conjugué à une vie familiale devenue insupportable. À cela, il convient d’ajouter le stress permanent vécu au sein d’une corporation qui, plus que jamais, est soumise à des rythmes de travail effrénés, une violence quotidienne qui ne fait qu’augmenter, un lien hiérarchique plus distendu que jamais et une protection administrative et judiciaire pour le moins incertaine.
Face à cette « hécatombe », une réunion d’urgence et plusieurs dispositifs, semble-t-il innovants, ont donc été décidés. Il s’agit, d’une part, de l’expérimentation du protocole israélien 6 C. Et, d’autre part, du concept de notation à « 360° ». La première mesure consiste en la mise en place d’une « thérapie » développée, à l’origine, pour les soldats de Tsahal afin de contrecarrer dans l’urgence les conséquences des chocs post-traumatiques vécus lors des combats. Cette méthode, appliquée aux policiers à l’issue d’opérations particulièrement difficiles, aurait pour objectif de minimiser les répercussions psychologiques et donc d’en limiter les conséquences sur les individus. La notation à « 360° » pourrait, quant à elle, permettre à tout subalterne de participer à la notation de son supérieur hiérarchique. Participeraient également à cette évaluation l’ensemble des partenaires sociaux concernés par le fonctionnement du service de police concerné.
Si le premier dispositif peut s’avérer intéressant, il est clair qu’il ne concernera que les seules actions de police. D’où la nécessité, pour qu’il soit véritablement efficace, de l’adapter à l’ensemble de la vie professionnelle du policier ou du gendarme. Sur le second point, des garanties importantes d’objectivité devront être arrêtées. En effet, avec un tel système, le « chef » pourrait rapidement devenir un bouc émissaire facile, ce qui reviendrait à fragiliser profondément des fondations de l’institution.
S’il appartient aux médecins et aux spécialistes de déterminer quelles pistes devront être suivies afin de permettre aux policiers de mieux vivre psychologiquement leur métier, il appartient à l’administration de réfléchir rapidement à des solutions internes.
Incontestablement, celles-ci passent par une réforme en profondeur de l’organisation hiérarchique. C’est ainsi que l’expérience professionnelle devra être le critère principal pour accéder aux grades sommitaux. De même, la création d’un véritable corps de « sous-officiers » de police, formés et responsabilisés, doit être réalisée de toute urgence. Par ailleurs, la formation continue, à côté d’une formation initiale solide, doit retrouver une place digne de ce non, en particulier en matière de management. Enfin, la protection administrative et juridique des policiers doit être considérablement renforcée. C’est à ces seules conditions que le suicide des policiers pourra être efficacement combattu.
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23 commentaires
Un suicide de détenu dans une prison, c’est un drame, 12 suicides en un mois dans la police, c’est juste de la statistique. Le gouvernement s’en fout, il n’y aura pas de manif de soutien avec dégradations.