[Tribune] Un metavers européen ? Le problème pris à l’envers ! 

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Dans son allocution du 17 mars dernier, le candidat à la présidentielle Emmanuel Macron posait le principe de construction d’un metavers européen.

Les métavers sont ces environnements immersifs ludiques ou sociaux qui deviendront un moyen de vivre par procuration avec un avatar agissant dans un espace virtuel où vous pourrez avoir des interactions sociales et commerciales. Carrefour et Casino ont déjà acquis des parcelles sur The Sandbox.

Si l’angle du président de la République est celui du contenu, de la création, des droits d’auteur, il s’agirait d’une volonté d’indépendance vis-à-vis des « acteurs » et « agrégateurs anglo-saxons ou chinois » dans un sens de souveraineté numérique. S'agit-il d'un effet d’annonce reprenant un terme à la mode ? Ou bien d'un contournement des sujets qui fâchent comme celui du cloud européen si critiqué (programme Gaia-X) ? Ou est-ce une véritable reprise en main de la place de produits ou de supports français, logiciels et œuvres, véritablement concurrentiels et indépendants dans le monde ?

Mais le metavers est aussi un enjeu de souveraineté culturel et social. Ne glisserions-nous pas ainsi vers un monde encore plus homogène et calqué sur celui d’outre-Atlantique ? N’a-t-on pas les forces pour créer un metavers français, tant nous possédons des laboratoires, des grandes écoles, de grands groupes, des entrepreneurs doués et aptes à prendre le train en marche de cette technologie ? Si nous sommes résignés sur des secteurs comme l’automobile ou l’intelligence artificielle, ces métavers ou l’informatique quantique ne nous sont-ils pas encore accessibles pour nous relever industriellement ?

En revanche, avec l’arrivée de l’identité numérique européenne, il faudra être vigilant à ce que des services publics ou privés n’utilisent pas ce canal en priorité, car dans cet environnement clos, la traçabilité du citoyen serait totale. Nous sommes déjà observés, traqués, catégorisés par les GAFAM (messagerie, réseaux sociaux) ou les data brokers : le métavers serait un « agrégateur » de choix pour ces pratiques d’observation à but commercial, de surveillance, de censure, de pénalisation. Là est l’enjeu politique de ces sujets numériques.

Alors qu’il serait possible de proposer un droit constitutionnel à l’« aconnexion » ou à l’« iconnexion », faut-il conserver des circuits de l’information traditionnels pour la frange de citoyens français « illectronisés » ? Ils étaient 14 millions, dans le rapport de la mission pour l’inclusion numérique, qui cite aussi le chiffre de 15 % de la population à n’avoir pas utilisé Internet en 2019.

Sans être trop dystopique, ces environnements aliénants posent le problème de la sédentarisation et de la virtualisation de l’existence. N’allons-nous pas vers des pratiques totalement distancielles pour nos interactions sociales, où le télétravail s’impose, où la livraison à domicile par livreur puis par drone sera normalisée, où il y a une atteinte manifeste à la mobilité : traçabilité des déplacements, taxation carbone à chaque action de son existence, assurances adaptatives, dissuasions de se déplacer, d’avoir un véhicule par son prix, le prix du stationnement, celui des carburants… Entre risque de crédit social « à la chinoise » dans la vie réelle et un espace ainsi aseptisé, sécurisant comme les métavers, ces solutions ne seraient-elles pas toutes asservissantes ? Quid de la projection de nos politiques sur ces changements de nos sociétés à portée de main et agissant sur nos libertés ? Voilà un vrai sujet de débat d’élection.

Lionel Mazurié
Lionel Mazurié
Vice-président de Debout La France, chargé du Numérique

Vos commentaires

10 commentaires

  1. Je lis : 15 % de la population à n’avoir pas utilisé Internet en 2019.
    Donc 1 électeur(trice) sur 6 qui ne peuvent suivre toutes les infos, de la réalité à la propagande, que par la TV dirigée par l’Etat et / ou un petit nombre d’Elites, de financements…Suivant ainsi à la lettre, sans raisonnement, sans liberté, ou se refermant sur soi même…

  2. Et quid de la sécurité numérique ? La sécu a été piratée et 500000 ont leurs données de santé exposées. En outre cela permet l’usurpation d’identité pour des risques minimes (3 ans de prison max pour une(des) vie(s) gâchées. Facebook a été piratée poulet fois. C’est une raison de plus pour être absent des réseaux a-sociaux…

  3. Jusqu’où ira-t-il dans la stupidité et l’infantilisation des Français? Tant que cela marchera il continuera.

  4. On visite déjà certains sites en virtuel, bientôt on pourra visiter des pays depuis son canapé, manger malbouffe vegan, télé travailler et mourrir jeune sans être sorti de chez soi. Elle n’est pas belle la future vie.

  5. Il y a deux manières d’utiliser un ordinateur. La manière intelligente qui consiste à programmer l’ordinateur et la manière imbécile qui consiste à être programmé par l’ordinateur. Autant il faut des cerveaux pour continuer à jouer un rôle dans l’informatique mondiale, autant c’est important pour le futur du pays, autant il est regrettable de voir des zozos passer des heures dans des mondes virtuels.

  6. Est-ce sain là et toute la question. Des participants à l experience en télé travail ont vu leur apport en vitamine D chuter de manière alarmante. De même et n ont plus fait de pauses. On a bien compris qu ils veulent la planète rien que pour eux.

  7. Tout ça ressemble à un vieux film de science fiction devenu réalité, ou en train de le devenir.
    Tout un monde virtuel, où on vit sa vie par procuration, comme disait J.J. Goldman.

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