[TRIBUNE] Un squatteur se blesse, puis demande au propriétaire de l’indemniser…

piscine

A l’été 2022, un groupe de jeunes parvient à entrer dans une copropriété privée et décide de se délasser dans la piscine.

Il y a 67 copropriétaires et un certain nombre d’entre eux sont demeurés sur place pendant l’été. Ils demandent donc aux squatteurs de partir, émettent des avertissements, mais rien n’y fait. Les jeunes squatteurs (puisqu’ils se maintiennent illégalement dans un lieu) ne bougent pas.

Puis, vient un drame. Un des jeunes, âgé de 18 ans, entame un plongeon dans la zone la plus basse de la piscine. Malheureusement, il atterrit sur la tête et se brise plusieurs vertèbres. L’occupation illégale de la piscine, simple bêtise d’adolescent, connait une issue dramatique : il est aujourd’hui tétraplégique.

Mais en juillet 2024, l’affaire connait un rebondissement. En effet, on apprend que son avocat a envoyé un courrier à l’assurance des copropriétaires, demandant des détails sur la sécurisation de la piscine. L’affaire est révélée par TF1, déclenche l’émotion légitime populaire : si la blessure du jeune homme est dramatique, n’est-ce pas un peu fort de café que de mettre en cause la responsabilité des propriétaires, victimes du squat ? Suite à cette émotion populaire, c’est le contre-pied, certains « sachants » nous expliquent qu’il n’y a pas de plainte pénale et que toute cette histoire est une recherche de buzz. Pourtant, ce courrier d’avocat est loin d’être anodin. Derrière la demande de détails sur la sécurisation de la piscine, il est aisé de voir venir la manœuvre : l’avocat du jeune tétraplégique cherche à mettre en cause la responsabilité de la copropriété pour obtenir une indemnisation. Certes, il n’y a pas de plainte pénale, mais il y a bien une action en justice, civile.

La justice abandonne les propriétaires ?

Et d’ailleurs, le scandale est si vraisemblable qu’il est déjà arrivé récemment… En effet, en droit français, le propriétaire d’un lieu a l’obligation d’indemniser la personne qui s’est blessée à cause du mauvais entretien de ce lieu. Et la justice a estimé que cette disposition s’appliquait même en cas de squat… C’est le cas d’une affaire de septembre 2022 qui avait défrayé la chronique. Dans cette affaire, la locataire d’un appartement parisien ne payait plus son loyer. Lésé, le couple de propriétaires avait utilisé les longues procédures habituelles pour obtenir l’expulsion de la locataire. Et dans un premier temps, la justice leur avait donné raison. La locataire devait donc quitter les lieux.

Mais en matière de squat, les décisions de justice n’engage que ceux qui y croient. Deux ans après cette décision, la locataire, n’a toujours pas quitté les lieux et se loge donc gratuitement, aux frais des propriétaires désespérés. C’est alors qu’elle chute de la fenêtre de sa cuisine et se blesse. Bien conseillée par son avocat, elle décide donc d’exiger une indemnisation aux propriétaires (qui lui ont déjà indirectement versé des milliers d’euros). Malheureusement pour ces derniers, la justice donne raison à la squatteuse à tous les stades : de la première instance à la cour de cassation.

Peu importe les complexes raisonnements juridiques, ce genre de décision apparaît incompréhensible pour le grand public, qui est la véritable fin de la justice. Au-delà de l’effet concret catastrophique de ce genre de jugement (l’encouragement au squat et donc la réduction du nombre de biens en location), comment la justice peut-elle réduire le trou béant qui se creuse entre elle et les citoyens français ? Ce genre de décision donne l’impression au grand public que le système à l’opposé de leurs « valeurs » : ne pas payer son loyer serait récompensé par l’Etat.

Comment ne pas penser à l’inversion des valeurs judiciaires qu’appelait de ses vœux la fameuse harangue d’Oswald Baudot, fameux juge du Syndicat de la Magistrature : « Ayez un préjugé favorable pour la femme contre le mari, pour l’enfant contre le père, pour le débiteur contre le créancier, pour l’ouvrier contre le patron, pour l’écrasé contre la compagnie d’assurances de l’écraseur, pour le malade contre la sécurité sociale, pour le voleur contre la police, pour le plaideur contre la justice. »

Pierre-Marie Sève
Pierre-Marie Sève
Directeur de l'Institut pour la Justice

Vos commentaires

26 commentaires

  1. C’est le monde à l’envers ! Voilà aujourd’hui la  » justice  » Française . Le mec squatte ILLEGALEMENT un endroit TOTALEMENT privé , se blesse et demande des indemnités !!!!! Albert Einstein a dit :  » Seul deux choses sont infinies ; L’univers et la bêtise humaine , en ce qui concerne l’univers je n’ai pas acquis la certitude absolue  » . Question bêtise la justice se pose là !

  2. Il faut quand même en tenir une couche pour plonger où il n’y a pas d’eau. Moi je veux bien que l’on dise que c’est un accident terrible pour le délinquant mais quand on est bête à ce point la société n’y peut rien. Qui va payer financièrement le coût de cette connerie? Le con-tribuable comme d’habitude, par des voies détournées certes (augmentation des primes d’assurance, durcissement des règles de sécurité des piscines).
    Tout ce qui est à toi est à moi et tout ce qui est à moi est moi: voilà la justice en France

  3. Hé oui , en France aujourd’hui, il faut mieux être squatteur que locataire, on est mieux protégé par la Justice…. C’est scandaleux, les truands ont toujours raison, et les gens honnêtes ont toujours tort. Il est grand temps de tordre le cou a cette justice noyautée par la pègre, par le milieu du grand banditisme, et j’en passe et des meilleures ! ! !

    • Vous ne résolvez rien, en écrivant cela. Allez plutôt rejoindre l’IPJ qui milite depuis sa création en 2007 pour une profonde réforme de la Justice, en faveur d’abord des victimes.

  4. ne dit-on pas : on est toujours puni par ou l’on a péché, là gravement puni , mais ce n’est pas au propriétaire de la piscine à payé la connerie de squatteur, il y a un sacré coup de balai à passer sur ses loi iniques !

  5. Que ce jeune ou sa famille porte plainte montre une réelle absence de morale, et si la justice va dans leur sens, comment ce jeune et ses copains apprendront ils ce qu’est la responsabilité de ses actes ?

  6. Curieuse époque, les délinquants inspirent le législateur dans la rédaction des lois et les juges refusent de les condamner, la boucle est bouclée. L’anarchie est au pouvoir.

  7. Il y a 20 ou 30 ans, à ma connaissance, ce genre de fait divers était inconnu du grand public ou n’existait tout simplement pas (sauf peut-être dans un sketch comique à la Fernand Raynaud). Dans le cas contraire, la plainte en question aurait je suppose, fait l’objet d’un non recevoir de la part de l’administration judiciaire, tant elle aurait été perçue complètement absurde au niveau du droit de la propriété.
    Aujourd’hui, comme en 1936, la gauche primaire, revancharde et bas-du-front (trotskiste) est présente dans presque toute les Institution (notamment fac de droit et Syndicat de la Magistrature ) et y règne sans complexe dans des tribunaux à connotation wokiste ou à défaut d’inspiration « révolutionnaire »
    Dénués de tout sens de l’humour et de subtilité, les Dupont-Moretti d’aujourd’hui s’inspirent du Fernand Raynaud d’hier.
    Juste retours d’une idéologie dominante qui ne prend sa source qu’au fond des urnes électorales.
    A mon avis, ceci explique sans doute un peu cela
    Aujourd’hui

    • Détrompez-vous, la loi défendant les délinquants en cas d’accident les incombant existe depuis longtemps; dans les années 60, j’ai bricolé un système de sonnerie d’alarme sous 220v dans la cave de mon père; un électricien passant par là m’a averti du risque judiciaire que nous prenions en cas d’électrocution d’un cambrioleur maladroit…

  8. « pour le plaideur contre la justice » ! Quelle justesse de vue, quand les juges seront-ils enfiin condamnés pour leur prise de position partisane, idéologique et politique ? Il est plus que temps que les magistrats soient responsables de leur décisions. Leur statut mérite d’être profondément remanié

  9. Il y a 40 ans, « on » m’avait dit sur le ton de la plaisanterie: « tire pour tuer, après tu auras le temps de faire les sommations ». C’était, à l’époque, exagéré mais il semble que cela devienne nécessaire…

  10. La violation de domicile ou propriété privée n’est donc plus puni par la loi . Eh bien je connais des endroits avec de belles piscines et je me dis qu’on pourrait aller en profiter avec les copines …….Qui donc oserait nous virer ?

  11. Donc si je comprends bien le mec plonge où il n’y a pas assez de profondeur et c’est de la faute des propriétaires. Et si il n’y avait pas eu d’eau, ils seraient tous à l’échafaud. Et la justice veut qu’on lui fasse confiance.

  12. Il faut l’achever. Simple, rapide et classement vertical du dossier. Maintenant, tous ces magistrat qui se disent débordés feraient mieux de s’occuper de la vraie justice.

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