Trump « ferme » les services publics et « se retire » de Syrie : pourquoi ?

Trump

Trump se trouve chroniquement confronté à une classe politique qui est fascinée par le mythe des frontières ouvertes comme par celui de la distribution internationale du travail, quelles que soient les conséquences pour les salariés et petits entrepreneurs des États de la planète. La « gauche » et la « droite » marchent ainsi de conserve afin de détruire les principes mêmes de la souveraineté comme de l’identité, urbi et orbi, au besoin en utilisant l’immense puissance militaire américaine. La récente crise budgétaire « sur le mur » comme le scandale provoqué par Trump en annonçant son intention de quitter la Syrie (voire l’Afghanistan) illustrent donc l’éternel combat entre ceux de Neptune (le grand large) et ceux de Tellus (les racines).

Cela soulève un autre « problème de fonds » : l’incapacité du pays à reconsidérer des pratiques budgétaires archaïques qui font, depuis des décennies, voler l’État de budget intermédiaire en budget intermédiaire, de fermeture partielle en fermeture partielle… sans jamais vouloir remettre en question ses priorités financières. Si l’on ajoute à cela que les règles internes au Sénat exigent, pour certaines mesures, une majorité de 60 sénateurs sur les 100, l’ensemble du système se grippe chroniquement, pour le grand bénéfice des crocodiles qui peuplent le marécage des compromis.

Sur la question migratoire, Trump s’était fait flouer, en début d’année, par les parlementaires qui, lors d’un budget intermédiaire dit « omnibus », avaient fait sauter le financement du mur à la toute dernière minute, lui promettant de procéder à ce financement à l’automne. Cette promesse non tenue (comme celle du financement des grands travaux d’infrastructures) a récemment coûté la perte de la chambre basse aux républicains (mais aussi le départ des républicains faux jetons).

Trump, aiguillonné, et sachant que l’année 2019 finira en impeachment s’il ne réagit pas, a utilisé le prétexte du dernier budget intermédiaire de l’année pour faire un show à la Maison-Blanche en compagnie des leaders démocrates Pelosi et Schumer, menaçant de ne signer aucun budget qui ne comprendrait pas un à-valoir de cinq milliards sur le mur. Puis il a poussé la Chambre (actuelle) à passer un texte allant dans son sens afin de coincer le Sénat (actuel) qui ne veut pas du mur (le Congrès nouveau démarrant début janvier). D’où le récent blocage partiel des services publics.

La raison officielle des opposants au mur est que cela coûte cher (à noter que la totalité du budget américain est de 4.400 milliards de dollars) et que ce n’est pas efficace (demander à Israël…). La réponse de Trump a été de prendre l’argument au mot : le mur relevant de la sécurité nationale, trouvons les cinq milliards dans les quelque 880 milliards de dépenses militaires (The Balance – US Budget Breakdown). Les caciques du Pentagone et du Sénat auraient résisté. Il a donc pris la décision – par tweet – d’annoncer le départ des troupes américaines de la Syrie, suggérant une mesure identique en Afghanistan. Ce qui a causé la démission accélérée du général Mattis, ministre de la Défense, et la nomination, dimanche, d’un ministre intérimaire.

Trump pourrait-il imposer sa vision à l’establishment ? Pas sûr. Reste que cette crise révèle que les États-Unis n’ont plus les ressources pour à la fois conquérir le monde, assurer leur sécurité aux frontières, refinancer leurs infrastructures autant que leur déplorable système de santé.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 09/01/2020 à 17:47.
André Archimbaud
André Archimbaud
Consultant stratégique

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