Ukraine : François Bayrou, lui aussi, chef de guerre !

À l’heure où nous écrivions ces lignes, François Bayrou et Sébastien Lecornu recevaient les présidents de groupes parlementaires de l’Assemblée nationale, du Sénat et de délégations au Parlement européen afin de les informer sur les points les plus sensibles du conflit ukrainien ainsi que des conséquences sur notre défense nationale. Intention louable et normale dans une démocratie censée être adulte. Une réunion qui s'est tenue à huis clos et pour laquelle les parlementaires ont été invités à laisser leur téléphone portable au vestibule. Normal. On se souvient du reproche fait, en 2022, au député LFI Alexis Corbière, d’avoir divulgué dans les médias des informations sur la livraison de matériel à l’Ukraine.
Ceux qui agissent et ceux qui bavardent
En même temps, en donnant cette information, le gouvernement fait de la com’ en installant une certaine dramaturgie sur la scène médiatique : le huis clos, les téléphones au vestiaire. Manquent que les couteaux au portemanteau. Mais aussi l’occasion, pour Sébastien Lecornu, de marquer son territoire, de prendre un peu plus d’espace au sein du gouvernement, après les épisodes Retailleau (Algérie) et Darmanin (isolement des narcotrafiquants), mais aussi d’installer avec les parlementaires (notamment, bien évidemment, les oppositions) un rapport de force entre ceux qui savent et agissent et ceux qui bavardent sans savoir : « exercice de sensibilisation sur des sujets opérationnels pour les représentants parlementaires », a expliqué l’entourage de Lecornu, selon Europe 1. Dans le dernier numéro de La Tribune du dimanche, le ministre des Armées ne déclarait-il pas : « Il faut impérativement réduire l'écart entre les informations dont bénéficient ceux qui sont aux responsabilités exécutives et les parlementaires. [...] On ne peut pas laisser des responsables politiques, et même demain des candidats à l'élection présidentielle, trop loin des réalités du monde. » Sous-entendu à peine voilé : « On ne peut pas leur laisser dire n’importe quoi. »
Bayrou reprend la main
Mais nous parlons de Lecornu, alors qu’en introduction, nous évoquions une invitation Bayrou et Lecornu. C’est là que les choses deviennent plus intéressantes ! Ce huis clos lancé par le locataire de l’hôtel de Brienne avec les parlementaires était une première. Jamais un ministre en charge des Armées n’avait fait ça. Mais, mercredi, François Bayrou a repris la main en faisant annoncer qu’il présiderait cette réunion. « De quoi me mêlé-je ? », dira-t-on ? Eh bien, tout simplement de ce qui le regarde. On a tendance à l’oublier, en ces temps où Emmanuel Macron a revêtu son bel uniforme de chef des armées (voir sa dernière séance de com’ à l’École militaire, mardi, avec trente chefs d’états-majors de l’OTAN et de l’UE), mais, selon la Constitution, le Premier ministre est « responsable de la Défense nationale ». Il est donc pleinement dans son rôle d’évoquer les questions de défense nationale avec la représentation nationale. Du reste, le secrétariat général de la Défense et de la Sécurité nationale est placé sous son autorité, pas sous celle du ministre des Armées chargé, lui, de préparer et de mettre en œuvre la politique de défense. Au fond, d'« exécuter », diront les malveillants. En dessous de la question de la guerre en Ukraine, il y a donc aussi la bataille d’occupation du terrain politique français. D’autant que Lecornu est perçu comme un très proche de Macron, pour ne pas dire un vice-Premier ministre.
Les traîtres sont autour de la table
À cette réunion, bien évidemment, Marine Le Pen et Jordan Bardella étaient présents. Ce qui faisait réagir, mercredi, sur France 2, l’inénarrable Marine Tondelier, non invitée car elle n’est pas parlementaire, mais qui savait d’avance ce qui allait se dire dans ce huis clos, car elle sait toujours tout sur tout : « C’est bien, Marine Le Pen va être informée de comment Poutine essaye de truquer nos élections pour la faire gagner, je trouve ça intéressant, comme concept qu’ils [le RN] soient autour de la table. » Traduction libre de notre part : « Ce sont des traîtres, des vendus à Poutine, ils n’ont rien à faire dans cette réunion. »
Au fait, de quoi a-t-on parlé, durant cette réunion ? À l’heure où nous concluons, nous n’en savons rien. Un, ce n'est peut-être pas ce qui était le plus intéressant, dans cet événement. Deux, c'est heureux, car rappelons qu’elle se tenait à huis clos et sans portables...
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Un commentaire
Armons nous et partez…….