Un lycée Angela-Davis sur les terres de Valérie Pécresse ?

Capture d’écran (1997)

L'Américaine Angela Davis n'a jamais caché ses opinions politiques. Longtemps membre du Parti communiste américain, cette militante des droits civiques, ex-Black Panther et admiratrice passionnée de l'URSS et de Cuba a daigné s'intéresser à la France pour signer, en 2021, une tribune fustigeant la « mentalité coloniale » française après avoir défendu dans une autre tribune, signée en 2013, le port du voile en France. De quoi faire tiquer Valérie Pécresse, la présidente de la région Ile de France, qui annonce sa volonté de changer le nom du lycée Angela-Davis de Saint-Denis, mercredi soir 29 mars.

Elle évoque pour cela les arguments « de ceux qui estiment que sa [Angela Davis, NDLR] radicalité est trop conflictuelle pour incarner la sérénité qui doit prévaloir dans un établissement scolaire » et souligne qu’« un certain nombre de positions récentes d’Angela Davis sur la France posent problème ». A la place de cette personnalité controversée, la majorité de droite propose, ce 29 mars, un amendement déposé par Vincent Jeanbrun, maire LR de L'Haÿ-les-Roses et président du groupe LR, le nom de Rosa Parks. Vent de panique au conseil régional d'Île-de-France. Car l'affaire Davis rebondit depuis plusieurs années...

En 2020, Pécresse avait accepté de donner à un lycée de Saint-Denis, inauguré en 2017, ce nom d’Angela Davis. Très remontée, la communauté éducative n’a évidemment pas manqué de lui rappeler le projet de délibération qu’elle avait alors signé.

Pour Pécresse, il s'agit donc de faire machine arrière. Mais comment ? Le nom du lycée Angela Davis figure bien sur le site de l’Éducation nationale mais... coup de chance, il n'a jamais été entériné par la collectivité régionale : il n’était finalement qu’officieux. Pourquoi ? Mediapart explique que Valérie Pécresse, à l'époque, avait retiré le rapport de l’ordre du jour, « invoquant de simples vérifications administratives. "Pour moi, il n’y a aucun sujet", assurait Valérie Pécresse face aux inquiétudes des groupes de gauche. "Le lycée s’appelle Angela-Davis, il a été nommé Angela-Davis, il n’y a pas de sujet". »

Le RN s'en félicite, la gauche s'estomaque

Tout va bien... La délibération proposée par le groupe LR est saluée par le conseiller RN-IDF Aymeric Durox : « au travers de cet amendement, une prise de conscience a eu lieu et je m'en félicite ». Lors de sa prise de parole, l’édile rappelle qu'Angela Davis était « une communiste révolutionnaire américaine qui pense que la laïcité est une arme contre les musulmans et que la police est violente et raciste ». L'élu RN demande que la jeunesse de Seine-Saint-Denis soit plutôt transcendée « par des modèles républicains, inspirants, français, comme Arnaud Beltrame […] ou comme Samuel Paty, décapité parce qu’il avait enseigné la laïcité à ses élèves, cette laïcité qu’Angela Davis juge raciste et islamophobe. »

Mais - c'était à craindre - cette analyse ne fait pas consensus. Céline Malaisé (PCF), présidente du groupe d’opposition Front de gauche au conseil régional, monte aussitôt sur ses grands chevaux et fustige une « énième panique identitaire, panique morale », ironisant : « À Angela Davis, il préfère Rosa Parks. C’est bien connu, les femmes noires sont interchangeables ». Le maire (PS) de Saint-Denis Mathieu Hanotin lui embraye le pas et mitraille : « Je veux ici préciser qu’il n’y a eu aucune association ni de la mairie ni de la communauté éducative sur cette initiative de changement de dénomination. C’est inadmissible ! Je demande formellement à la présidente de région Valérie Pécresse de retirer ce projet d’amendement ». Alors, la malheureuse candidate à l’élection présidentielle recule et annonce qu'elle... retire cet amendement. Deuxième retropédalage.

Après deux reculades, pas question de risquer un camouflet. Alors, elle refuse de soumettre au vote cette délibération : Valérie Pécresse n'assume plus, botte en touche et préfère saisir le ministère de... l’Éducation nationale. « Dans un lycée français, on doit apprendre à aimer la France », dit-elle. Vrai. Reste à savoir si la Macronie en général et Pap Ndiaye en particulier en sont les meilleurs défenseurs... Comme le rappelle Mediapart, Pap N'Diaye « connaît le sujet de près, lui qui a écrit Les Noirs américains. En marche pour l’égalité en 2009 et travaillé depuis trente ans sur la condition noire aux États-Unis et en France et la lutte contre les discriminations raciales ». Choisira-t-il, dès lors, de défendre la laïcité et les valeurs républicaines ou une militante racialiste contestée ? À suivre...

Iris Bridier
Iris Bridier
Journaliste à BV

Vos commentaires

20 commentaires

  1. Heureusement que le flop du « Vous m’avez manqué ! » de Valérie Pécresse ne s’est transformé qu’en un immense folp LR !
    Si non, plutôt que le « tango-tangage-Macron » qui met la France en feu, eut été remplacé par une « valse-à-mille-retourne-temps » sauce Pécresse !
    On est bien avec tout ça ma bonne Dame !

  2. On a bien donné à une rue d’Aubervilliers, le nom d’une poseuse de bombes du FLN qui avait sur les mains le sang de dizaines de femmes et d’enfants innocents… Pourquoi se gêner avec Angela Davis qui elle, a priori, n’à au moins tué personne…

  3. Il est bien évident qu’Angela Davis est un contre modèle pour la jeunesse ;quelle idée d’avoir donné son nom à un lycée.
    Le retirer serait une bonne chose…
    On pourrait la remplacer par Sophie Scholl, la jeune étudiante allemande, résistante au nazisme, et qui fût exécutée par les hitlériens.
    Angela Davis, elle a fait quoi, à part brailler.

  4. heu… angela davis, Rosa Park… nous ne sommes pas en France? y a t-il beaucoup de lycées Simone Veil aux USA? et nous n’avons pas assez de Françaises digne de donner leur nom à un lycée?
    alors, l’un comme l’autre…

  5. Il n faut pas avoir une bonne idée au mauvais moment. Des lumières gauchistes à une époque ont nommé ce lycée. Pourquoi se saisir d’un bâton épineux et maintenant ? Tenter d’exister? Ça sent l’épuration culturelle. Les statues et les bustes de Staline doivent-ils être aussi dégagés. En tous cas V.Pecresse ne l’appellera pas Samuel Paty. Alors pourquoi la droite sans droite s’aventure en terrain miné ?

  6. Tiens donc madame Pécresse essaye une bonne action non pas pour la planète mais pour notre France, celle que nous aimons, pas celle des gauchistes communistes et sympathisants de tout poil, il serait temps.

  7. Encore une histoire de fous. Elle devrait baptiser ce lycée « Jacques Chirac ». Ca n’étonnera personne .

  8. Il y en a marre de cette pollution américaine en France.
    Je suis français, fils des lumières et de l’universalisme et aujourd’hui, ceux qui ont perpétré le plus grand génocide de l’histoire veulent nous donner des leçons de tolérance balourdes, stupides et extrémistes.
    D’après eux, je mérite le pire parce que je suis un homme, blanc, hétérosexuel et chrétien ?
    Tout ça parce qu’ils n’ont jamais été capables de faire cohabiter pacifiquement les noirs et les blancs sur leur territoire.
    Et bien vous m’excuserez de douter de tout ce que les USA trouvent nuisible alors, à commencer par la Russie et la Chine, qui ne semblent pas être inondés de cinglés woke qui tuent des enfants ou d’éco-terroristes.
    Si c’est là tout ce que l’occident est dorénavant capable de proposer, puisque la France n’a plus d’autre possibilité que de choisir un maître, alors je préfère encore l’autre côté.

    • Votre commentaire correspond à ce que je pense des USA, un pays sans morale qui ferait mieux de regarder ce qui se passe chez lui plutôt que vouloir s’ingérer partout sur terre ou il sème le désastre et la mort.

    • Certe, en matière de crime contre l’humanité, il y a longtemps que les états unis seraient condamnés sauf qu’ils détiennent encore le monopole d’une bonne conscience et aussi grâce à leur dollars. (de moins en moins)

    • « Tout ça parce qu’ils n’ont jamais été capables de faire cohabiter pacifiquement les noirs et les blancs sur leur territoire. »
      Ils ont déjà commencé par exterminer les Rouges avant d’importer des Noirs pour en faire leurs esclaves. Il est donc peu surprenant que les débuts tourmentés de « l’American way of life » puisse laisser quelques rancœur chez les descendants de ceux qui ont fait les frais de la prédation originelle.

  9. Lycée à 100 mètres de chez moi. Je trouve la démarche de Pécresse convenable. Mais évidemment elle aura tout le monde contre elle ici

  10. simple question : pourquoi Angela Davis, si près de Cuba, n’est pas allé s’installer là-bas ? elle aurait profité de tout le bien qu’elle pensait de ce régime, et aurait fait profité au pays de tout l’apport qu’elle amenait : à méditer

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