Un procès pour gagner le droit de travailler, à 74 ans !

les âges de la vie retraites

On apprend aujourd’hui, dans Le Parisien, qu’un professeur de droit dont l'université de Caen voulait se séparer va pouvoir reprendre ses cours. Trop vieux ! disait l’institution. La Justice vient d’en décider autrement et Jean-Jacques Thouroude, 74 ans, « considéré comme une référence en France en termes de droit administratif », nous dit-on, va retrouver ses étudiants à la rentrée.

C’est en 2021 que l’université lui avait signifié sa mise sur la touche après cinquante années d’enseignement, non par peur du Covid mais « considérant que j’avais dépassé la date limite de péremption », dit avec humour l’ancien avocat.

L’affaire est subtile, comme souvent en droit : « Les agents contractuels de l’administration ne peuvent plus exercer après 67 ans, écrit Le Parisien. C’était là l’argument de l’université. Mais c’était sans compter sur la subtilité du droit que le juriste, lui, n’ignore pas… Car après sa retraite d’avocat et de maître de conférences, Jean-Jacques Thouroude a bien continué à enseigner 30 heures par an, non pas en tant que contractuel mais comme… vacataire ! » Or, il n’y a pas de limite d’âge pour les vacataires. Donc, M. Thouroude va pouvoir reprendre ses 30 heures de cours annuelles.

Tout heureux, il confie : « C’est quand même un comble de gagner, à 74 ans, un procès pour travailler plus et gagner plutôt moins ! » Pourquoi moins ? Parce qu’il se peut qu’on lui ait demandé, comme à tout citoyen ordinaire qui continue de travailler après l’âge légal de la retraite, de payer des cotisations à fonds perdus. Des charges qui viendront certes abonder la retraite des autres mais pas augmenter la sienne.

C’est, en France, la condition sine qua non pour pouvoir poursuivre une activité. À moins, bien sûr, qu’on ne s’agite dans les hautes sphères où l’âge n’est alors plus un handicap mais une carte d’entrée perpétuelle dans les allées du pouvoir ou des médias. Quelques exemples, en passant…

On peut ainsi entendre, sur Europe 1, chaque samedi matin (hors vacances), les Grandes Voix : elles « mettent leur expertise et leur parfaite connaissance de la vie politique au service des auditeurs », dit la station. Il s’agit de Catherine Nay (80 ans), Michèle Cotta (86 ans), Charles Villeneuve (82 ans) et Gérard Carreyrou (81 ans). Gérard Leclerc, qui vient de nous quitter, avait 71 ans, comme son ami Laurent Joffrin. Ségolène Royal, 70 ans dans quelques jours, ne renonce pas à ses ambitions présidentielles pour 2024, et pourquoi pas d’ailleurs, sachant que Brigitte Macron, conseillère intime du Président, a fêté ses 70 printemps en avril dernier.

En attendant les jours heureux et très hypothétiques de son élection comme première Présidente des Français, Ségolène Royal va se lancer dans la carrière radiophonique ; c’est ce que fait, depuis longtemps, sa meilleure mauvaise copine Roselyne Bachelot, 76 ans, nommée ministre de la Culture sous Macron Ier à… 74 ans. Leur pote Gérard Larcher, qui ne compte pas laisser la présidence du Sénat, en a 73. Quant aux neuf « sages » du Conseil constitutionnel placés sous la houlette de Laurent Fabius (76 ans), leur moyenne d’âge n’est que de 72,5 ans grâce à deux petits jeunots qui n’en ont que 65.

Pour eux, il n’y a pas de retraite : au contraire, ils les cumulent. Pas de mise à l’écart, la haute administration leur reste aussi ouverte que les micros. Il paraît qu’en 68, on a fait la révolution parce que la France était dirigée par des vieux…

Marie Delarue
Marie Delarue
Journaliste à BV, artiste

Vos commentaires

17 commentaires

  1. A 75 ans le maire de mon village me demande de reprendre du service comme médecin coordonnateur de l’EHPAD public, donc j’accepte et m’inscrit au diplôme universitaire de gériatrie, et je suis donc payé pour un mi temps et la je découvre que je cotise pour la retraite, alors que je la perçois depuis dix ans, donc ces sommes assurent la retraite des plus jeunes.

  2. La seule question qui n’est pas soulevée ici c’est quel est l’avis des étudiants sur ce genre de professeur. Ayant occupé des fonctions du même type, je sais que c’est par la double activité professionnelle réelle et l’enseignement qui attire les étudiants. Alors ?

  3. On vit une société anarchique où on veut faire travailler plus longtemps les gens qui en ont marre, et empêcher de travailler ceux qui se réalisent dans une carrière où ils excellent, et pas pour des raisons financièes, sans doute.

  4. Une belle leçon pour ces responsables de l’université qui, non seulement se sont ridiculisés aux yeux de tous, à commencer leurs étudiants, mais du monde académique dans son ensemble.
    C’est jouissif, bravo à lui !

  5. Comme chantait Brassens : » Le temps ne fait rien à l’affaire, quand on est c…………… ». Ce collectivisme outrancier est aberrant. Beaucoup trop de profiteurs ! C’est ce qui a tué l’URSS. La devise communiste étant : tout ce qui est aux autres est à moi, et tout ce qui est à moi,…………………… est à moi.

  6. A noter que de nombreux petits retraités, dont la pension ne dépasse pas bien souvent les 2000 euros, s’adonnent bénévolement à des actions visant le bien public, par exemple aux Restaus du cœur. Tous ce gens que vous citez, dont les retraites se comptent déjà à cinq chiffres, ne devraient ils pas, dès lors qu’ils occupent à plus de 70 ans, tels Fabius ou Juppé, des fonctions publiques, les exercer, eux aussi, bénévolement ?

  7. Payés à rien faire, ce n’est pas fatiguant. Il n’a qu’à voir tout ces fainéants à l’assemblée nationale ou au sénat. qui jouent avec leur smartphone (sûrement piraté ) au lieu d’écouter ce qui se dit. « Silence pour la France ! » pourrait être complété par « Écoutez. pour la France ! », mais ils sont sourds.

    • Stop, « payés à rien faire », c’est trop facile à dire, et le débat n’est pas là! Dans le cas présent, cet enseignant exerce env. trente heures par an, vous conviendrez que , même si bien payées, elles ne constituent pas une fortune.

  8. J’ai cessé de travailler à 76 ans révolus. Il m’a fallu payer des droits sur ce travail indu mais ma santé en a été boostée comme on dit de nos jours .

  9. J’aime bien la dernière phrase car ce sont ces mêmes « soixante huitards » qui s’accrochent à leurs postes comme des arapètes !

  10. Nouveauté dans cette République de fainéants faire valoir la justice pour avoir le droit de travailler !
    sauf pour les politiques qui se sentent obligés d’en profiter un maximum sur le dos de la société pour accumuler leurs multiples rentes Républicaines.

  11. Le deux poids deux mesures que vous signalez fort à propos, madame Delarue, devient d’autant plus injuste que les inégalités se creusent. L’Histoire est témoin de révoltes qui sont nées de cette dérive.

  12. Par contre pour les élus pas d’âge , cumul des mandats et des retraites , compétents ou pas .
    Une injustice de plus dans ce pays .

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