Un P’tit truc en plus, ce ciné joyeux qui rend les spectateurs heureux

Capture d'écran YT
Capture d'écran YT

Sorti en salles le 1er mai, et avec déjà plus de cinq millions d’entrées, le film d’Artus Un p’tit truc en plus est en train de devenir un véritable phénomène de société. Un film joyeux et coloré qui fait la part belle à la spontanéité et au charisme des personnes handicapées. Drôles et touchants, les personnages campés dans cette histoire jouent naturellement. « J'ai dit à mon chef opérateur, Jean-Marie Dreujou, quoi qu'il arrive, il faut qu'on soit sur le qui-vive. Tant pis si on n'est pas officiellement en train de tourner, ce qui surgit, il faut le choper. Ce qu'on voit, à l'image, ce sont des moments vrais. Pas du jeu », confie Artus, dans un entretien accordé au site handicap.fr. Alors, on ne peut s’empêcher de rire, sans jamais se moquer, devant ces éternels enfants parce qu’ils ont incontestablement ce « p'tit truc en plus » qui désarme les personnes sérieuses et les cœurs endurcis.

Si certaines sensibilités pourront être heurtées par la présence, parfois, d’un langage peu châtié, cette grossièreté ne s’explique que par le caractère sans filtre et décalé de ces personnes handicapées. « J'ai toujours eu envie de montrer ce dont elles sont capables ; elles ont un imaginaire incroyable, une magie ou une folie qu'on ne rencontre pas ailleurs. C'est avec elles que je voulais faire un film. Pas sur elles. Le handicap, en soi, n'est pas le sujet. Ce film, c'est une colonie de vacances, avec tous les moments de vie que cela suppose, mais puissance mille, parce que l'histoire est portée et jouée par des gens qu'on n'a pas l'habitude de voir au cinéma », témoigne encore Artus.

 

C'était donc ça, la vie aux côtés d'une personne handicapée ?

 

Et c’est peut-être précisément parce que l’on n’a pas l’habitude de les voir jouer au cinéma que le public se laisse tant attendrir et que la magie opère. Car ce public ne savait pas, lui à qui l'on a trop peu raconté le quotidien vécu avec une personne handicapée, ne lui montrant la plupart du temps que les difficultés. Pire : notre société eugéniste cherche, jour après jour, loi après loi, à l’en séparer. Alors ce grand public, amputé d'une part de son humanité, aura bien peu de chances d’en rencontrer. À l’inverse d’Artus qui, enfant, côtoyait un ami autiste et a vite compris les railleries et les moqueries. À l’heure où la vulnérabilité est présentée comme une honte dans notre société de normalité bien-pensante et performante, une épreuve insurmontable qu’il vaut mieux contourner par un avortement (et, bientôt, un suicide assisté), que 96 % des enfants diagnostiqués trisomiques en France sont déjà avortés avant leur naissance, ce film met en lumière ce qu’on avait fini par oublier : la joie de vivre, la tendresse et la grande simplicité. Et le grand public qui pensait que l’on pouvait prendre un café joyeux, mais ne surtout pas accueillir un enfant différent, plébiscite cette authenticité : le film d’Artus est actuellement le plus gros succès de l’année dans les salles françaises.

Un détail attire notre attention, dans ce film ; la presse féministe l'a-t-elle remarqué ? La scène finale montre que le centre où se retrouvent ces personnes porteuses de handicap se trouve place Simone-Veil. Troublante coïncidence... L’artiste a-t-il cherché à dénoncer la schizophrénie de notre société inclusive qui constitutionnalise l'élimination d'embryons non désirés ou différents ?

Quelles que soient les intentions d’Artus, il voulait « du soleil, de la joie et surtout pas de pathos. À chaque fois qu’on filme des personnes porteuses d’un handicap mental, ça se passe dans le Nord et sous la pluie, comme s’il fallait rajouter un temps pourri… Moi, je voulais qu’ils soient stylés. [...] je voulais que ce soit un cocon, que la lumière soit chaude, que tout le gîte soit beau, que les plans soient beaux… Pour que tout le monde ait envie d’être avec eux. » Mission accomplie, ou presque, pour celui qui en appelle à ce que « les choses bougent : les différences sont une force, j'en suis convaincu ». Gageons que cet immense succès au box-office y contribue à sa façon.

 

 

Iris Bridier
Iris Bridier
Journaliste à BV

Vos commentaires

15 commentaires

  1. Désolé d’être en désaccord, je n’ai pas aimé ce film, bien sûr émouvant, mais il y a une distorsion entre les vrais acteurs que sont les handicapés et les « professionnels » qui ne sont pas très bons, surtout la starlette monitrice.

  2. Je ne parlerais pas du film, je ne l’ai pas (encore) vu. Par contre, vous critiquez a demi mots les gens qui se font avorter lorsqu’on leur annonce que leur enfant sera triso. Avez vous un enfant triso? Pensez vous savoir ce que peut être la vie des parents d’un enfant assez lourdement handicapé ? Vouloir donner des leçons c’est une chose, avoir le vecu necessaire pour le faire en est une autre. Souvent les parents d’enfants triso sont âgés, plus que la moyenne des parents. Imaginez un instant vivre en esperant que votre enfant disparaisse avant vous car vous ne savez pas (ou trop bien) ce su’il adviendra de lui après votre depart? Pouvoir assumer certains comportements au quotidien, je ne detaillerais pas mais les parents de triso savent. Toutes questions qu’il faut savoir se poser. Alors oui, parfois il arrive que des parents ne se sentent pas d’assumer cette vie. Sont ils condamnables pour autant? Je ne pense pas. J’ai la chance d’avoir eu des enfants non atteints par ce handicap, mais j’ai eu un voisin triso, parfois très gentil, cool rigolo parfois pas, et vu la detresse des parents dans ces moments…

  3. Cela me rappelle un autre film : le 8eme jour très beau que j’ai vu et revu, si vous ne l’avez vu, je vous le conseille

    • Il est certain qu’en Amérique la misère n’est pas une référence pour en faire un dogme publicitaire

  4. A l’inverse de « Mice and men » ( « des souris et des hommes », le chef d’œuvre de J Steinbeck) nous découvrons que les personnes handicapées ont quelque chose à apporter à la société .Hormis la simplicité, la joie de vivre et l’insouciance elles nous révèlent nos propres faiblesses , notre vulnérabilité .Le film apporte quelques réponses et chaque éducateur, chaque aidant même involontaire se doit de devenir meilleur , d’appliquer les « valeurs » dont il se réclame . Seule les imbus sont repoussés dans l’enfer de la solitude … Chapeau l’artiste , merci Artus.

    • Je me souviens dans les années 80 j’était chauffeur de bus et je transportait des enfants handicapés (Papillon) et d’autres plus âgées a (ETH). Je peu vous dire qu’au debut il y a une réticence (changement de chauffeur) mais au bout d’un mois ils m’ont apprivoiser et on est devenue de super pote, discutions intelligentes, n’allez pas croire qu’ils sont bêtes et disent n’importe quoi, en fait cela a été une super expérience pour moi et pour eux aussi j’espère.

  5. Rafraichissant, donne envie d’aller voir le film. C’est beaucoup mieux de faire des blagues avec les handicapés, plutôt que les exclure de ça aussi.
    A propos d’handicapés, je regrette que l’on dise « non voyant » au lieu d’aveugle, mal-entendant au lieu de sourd, etc. Je trouve ça irrespectueux. Eh non, ce n’est pas honteux d’être aveugle, sourd, handicapé (et non « en situation de handicap »). Inutile de projeter sa gêne dans son vocabulaire. On aura fait un grand progrès quand, handicapé ou non, ça ne changera rien dans le vocabulaire et donc dans les attitudes aussi.

    • « «En des temps d’imposture généralisée, dire la vérité est un acte révolutionnaire.» (Orwell). C’est pour cela que nos dictateurs au petit pied œuvrent depuis des années pour instaurer l’imposture et la dissimulation comme système de gouvernement. Il importe surtout ne pas nommer les choses telles qu’elles sont, mais les entourer d’un nappage de ouate bien confortable pour éviter d’être incommodé par l’odeur de la vérité.

  6. Un super film , des acteurs formidables , à ne pas rater le bon cinéma se fait rare . Merci à toute l’équipe pour ce moment de bonheur .

    • Vous appelez ça du bon cinéma ? AFFICHER la misère TRISO sur les écrans, Eux ne s’en rendent même pas compte !

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