Une chanson de Calogero jouée au meeting du RN : le chanteur s’indigne

©Guy Delsaut/ Wikimedia Commons
©Guy Delsaut/ Wikimedia Commons

C’était l’ultime meeting du Rassemblement national avant le scrutin européen du 9 juin prochain. Très attendue, cette réunion publique a eu lieu dimanche, au Dôme de Paris. Jordan Bardella s'y est adressé à quelque 5.000 sympathisants chauffés à blanc par la perspective d’une large victoire de leur camp, annoncée par tous les instituts de sondage depuis des mois. Au cours de ce rassemblement à l’ambiance festive, plusieurs chansons ont retenti dans le Palais des Sports. Il y a eu des titres d'ABBA, le tube Freed from Desire de Gala, l’inusable I Will Survive de Gloria Gaynor... Mais pour conclure son discours, c’est sur un autre morceau que le patron du RN a jeté son dévolu : 1987 de Calogero. Un choix qui a fait sortir de ses gonds le chanteur. « À aucun moment je n'ai donné une quelconque autorisation d'y diffuser ma musique. J'affirme que jamais je ne l'aurais donnée », a-t-il écrit sur Instagram, se déclarant « scandalisé » par un tel procédé. « Je me réserve le droit de donner toute suite judiciaire à cette affaire. »

 

 

En commentaire de son message indigné, l’interprète de Face à la mer a reçu le plein soutien de ses fans. « L’extrême droite montre qu’elle fait du populisme », s’alarme Arnaud. « Votre public sait très bien que ce parti ne représente en rien vos valeurs », ajoute Katie. « Il faut à tout prix faire une plainte auprès du procureur de la république, car c'est une atteinte à tout ce que vous représentez et à nous, vos fans, qui vous aimons pour vos valeurs », abonde aussi Karine.

 

Une polémique instrumentalisée par l’extrême centre

 

Pour certains comptes macronistes un tantinet complotistes, le choix de cette chanson ne devrait rien au hasard. Il s’agirait, en réalité, d’un message subliminal envoyé aux franges les plus haineuses de notre société. « Pour rappel, 1987 est l’année ou Jean-Marie Le Pen parle pour la première fois du point de détail de l’histoire de la seconde guerre mondiale, notent-ils, finement. Le naturel finit toujours par revenir ! » Belle déduction, Sherlock Holmes. Le RN a en effet tout intérêt à faire référence au « point de détail de l’histoire » à une semaine du premier tour de l’élection, c’est évident.

 

 

En réalité, cette chanson issue de l’album Liberté chérie (2017) est avant tout une ode à l’adolescence de l’artiste. Pour la plupart des Français, comme pour Jordan Bardella sans doute, elle évoque aussi une période plus heureuse de l’Histoire de France. Une époque révolue où les Français étaient en sécurité dans leur pays et où les mots « hijab », « abaya » et « kouffar » étaient encore inconnus du grand public.

 

La perspective de poursuites contre le RN ?

 

Si les partis politiques qui utilisent des musiques lors de leurs meetings paient bien des droits à la SACEM (Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique), ils n’en sont pas pour autant quittes du droit moral. Ils doivent, en effet, demander en amont la permission à un artiste ou ses ayants droit pour l'utilisation d'une œuvre, comme l’indique, à l’AFP, l’avocat Pierre Lautier, spécialisé en droit d'auteur. C’est peu ou prou la même chose aux États-Unis, où Donald Trump a subi les foudres de Rihanna, Phil Collins, Elton John ou encore Adele, après s’être servi de leurs chansons pendant ses meetings sans leur autorisation préalable.

À défaut de validation, les artistes sont en droit de demander des comptes aux partis indélicats en lançant une action en réparation pécuniaire devant un tribunal. Reste à voir, maintenant, jusqu’où Calogero décidera d’aller. S’il affirme s’opposer à ce que sa musique soit récupérée « par quelque parti que ce soit », on l’imagine mal s’indigner de la sorte indépendamment de l’appartenance politique du contrevenant. Aurait-il pareillement menacé de poursuites le camp présidentiel si, d’aventure, Valérie Hayer avait utilisé sa chanson ? Rien n’est moins sûr.

Jean Kast
Jean Kast
Journaliste indépendant, culture et société

Vos commentaires

44 commentaires

  1. Est ce que Calogero que j’apprécie en tant qu’artiste vérifie qui écoute sa musique et achète ses albums?
    Je vote RN depuis des années et je télécharge ses musiques.
    Demande t-il la carte d’électeur aux personnes qui viennent le voir à ses concerts?
    Quelle hypocrisie

  2. Je suppose que Monsieur Calogero perçoit des droits d’auteur quand une de ses « oeuvres » est interprétée. Si la SACEM lui reverse ses droits d’auteur concernant cette prestation par un tiers, s’offusquera-t-il alors de la provenance des fonds ? Wait and See.

  3. J’espère que si le RN accède au pouvoir, il supprimera toutes les aides dont le milieux de ces « artistes » bénéficie. Comme l’a si justement signalé un autre intervenant, sait il qui achète ses disques? Est il sur qu’aucun méchant facho ne le finance? Je n’étais pas fan de ce monsieur, ça ne va pas s’arranger…

  4. A aucun moment il n’aurait donné son autorisation. Mais sans doute l’aurait-il vendue ?

  5. Calogero, fait gaffe nous sommes plus de 40% (RN et Reconquête) un boycott de tes « œuvres » te ferait mal.

  6. L’anecdote ne nous dit pas si l’artiste renonce, dans le plus pur respect de ses valeurs, aux droits Sacem concernant la part des électeurs RN qui écoutent ses oeuvres. Pour aller jusqu’au bout de la démarche, exclut-il les sympathisants de droite de la billetterie de ses concerts?

  7. Encore un bobo qui certainement est a l abri de l immigration incontrôlée. Il affirme son appartenance au camp du bien, quel courage

  8. C’est qui Calogero ?
    Qu’est-ce qu’il chante ?
    Du style « djadja » ?
    Pardonnez-moi, mais je ne connais pas, aussi qu’il soit content ou pas, cela m’indiffère.
    Il peut imiter Renaud (le chanteur) et s’installer au Canada.

  9. Monsieur Callogero, on se calme – la musique, c’est comme le vent, çà se répand ou çà veut !
    La musique n’a pas de couleur autre que ses harmonies, et l’harmonie n’est pas le privilège d’un parti, quel qu’il soit – je vous croyais plus fin que çà –

  10. Il devrait obliger ses vendeurs à demander à ses acheteurs leur bord politique ; pauvre type, il me déçoit terriblement.

  11. Il serait bon de rappeler de temps en temps les aides financières explosives dont bénéficient les artistes et tous les intermittents du spectacle dans notre pays. Je dis bien dans notre pays, rien de semblable dans d’autres pays d’Europe. Ces gens là devraient un peu se la jouer modeste et ne jamais oublier qu’ils sont financés par l’ensemble des Français, enfin par les Français qui travaillent et/ou qui ont travaillé, cotisé et payé des impôts. Comme nos journalistes du service public qui eux, sont doublement entretenus par les Français con-tribuables !

  12. Je ne connais pas cet individu. Si sa position est celle de ses convictions profondes, c’est respectable, mais si c’est opportuniste, comme pour beaucoup de personnes, alors ce serait condamnable, car ce sont celles-ci, qui si le RN arrive au pouvoir, iraient lécher les bottes des nouveaux élus.

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