Une école anglaise donne un satisfecit à l’islamisme et à la délation

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Une semaine après la suspension d'un professeur de la Batley Grammar School, accusé d'avoir montré à ses élèves des caricatures de Mahomet, deux de ses collègues viennent d'être, à leur tour, sanctionnés pour avoir été au courant de ce délit intolérable et ne pas l'avoir dénoncé. C'est ce que nous rapporte l'hebdomadaire Marianne, tirant sa source du Daily Mail. La France n'en est pas encore là, direz-vous. Peut-être, mais, au train où vont les choses, ça ne saurait tarder.

Le Royaume-Uni, champion du multiculturalisme, en paie les pots cassés. Mohammad Sajad Hussain, responsable d'une association caritative, a mis le feu aux poudres en adressant à la direction de l'école un courrier accusant le professeur sacrilège de « terrorisme contre l'islam et les musulmans du monde » et exigeant qu'il soit « écarté de manière permanente ». Il a précisé que son association prendrait la même position « contre toute organisation qui attaque notre bien-aimé prophète Mahomet ». Tenez-vous-le pour dit !

Non contente d'obtempérer, la direction de l'établissement a renchéri, suspendant également deux autres professeurs suspectés de complicité passive. Un de ses responsables, sous couvert d'anonymat, déclare que « [la caricature] ne faisait pas partie du matériel scolaire approuvé par l’école », ajoutant que « si rien ne suggère que les deux professeurs ont utilisé cette image pendant leurs leçons, ils savaient en revanche ce qui se passait, ce qui montre bien une fêlure dans le système ». Jusqu'où va la soumission !

Le professeur incriminé est en fuite, avec sa femme et ses enfants. Son père confie au Daily Mail que « [son fils] s’inquiète que sa famille et lui soient tués. Il sait qu’il ne pourra pas retourner travailler ou vivre à Batley, car cela serait trop dangereux pour lui et sa famille. Regardez ce qui est arrivé au professeur en France, qui a été tué pour avoir fait la même chose. » Si une majorité de la classe politique britannique soutient cet enseignant, il reste qu'on a pu, impunément, lancer contre lui une sorte de fatwa.

À cet acte de lâcheté est lié un autre comportement, tout aussi grave. La suspension de deux professeurs, coupables d'être au courant et de n'avoir rien dit, est une façon d'encourager la délation. Certes, il convient de dénoncer la préparation d'un crime, si l'on en a connaissance, mais, en l'occurrence, où est le crime ? La délation va-t-elle devenir un devoir civique ? Selon quels critères et quelles valeurs ?

Il est patent que des municipalités, pour des raisons électorales, font des concessions aux revendications communautaires. Le gouvernement, au-delà des mots, reste passif. À quand la délation des réfractaires à la soumission ? Elle ne demande qu'un prétexte pour se libérer de tout scrupule. Voyez la crise sanitaire : on n'a pas encore prescrit, comme un ministre britannique, que « les gens doivent signaler les voisins qu’ils soupçonnent d’accueillir un rassemblement de sept personnes ou plus ». Mais il arrive que des Français, s'imaginant agir pour la bonne cause, dénoncent spontanément, enregistrements à l'appui, des contrevenants.

On cite souvent, comme repoussoir, les dénonciations sous l'Occupation. On pourrait aussi citer la période de la Libération et, surtout, l'histoire des régimes totalitaires. George Orwell a bien montré, dans 1984, comment la délation généralisée est une de leurs armes préférées. Ne pas juguler son usage, voire l'encourager, c'est emprunter leurs méthodes. La soumission, par lâcheté, complaisance ou angélisme, conduit à une subversion des valeurs qui fait passer les bas instincts pour des vertus.

Philippe Kerlouan
Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

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