[Une prof en France] La violence : le lot quotidien des élèves

violence lycée

Jeudi, à Vénissieux (Rhône), un lycée a essuyé des tirs de mortier et des jets de pierre. Parmi la dizaine de « jeunes » ayant participé à cette opération musclée, seul une personne a été interpellée, semble-t-il. Les médias disent que le rectorat avait été alerté à plusieurs reprises au cours des semaines précédentes des dangers que couraient les élèves et les personnels de l’établissement. Il n’avait pas réagi et reste injoignable. Le même jour les condisciples de ma fille ont été confinés dans leur établissement car un individu violent errait autour de leur lycée après avoir fracassé le crâne d’un jeune homme contre le mur extérieur de l’établissement. Quelques jours avant un père de famille avait été poignardé en plein centre ville, devant l’un des magasins les plus fréquentés par les collégiens et lycéens, après avoir tenté de s’interposer alors que des « jeunes » importunaient des jeunes filles dans la rue. Vendredi soir, lorsque mes filles sont arrivées à l’arrêt de bus, elles m’ont raconté avoir assisté à une agression particulièrement violente : une jeune couple s’embrassait pour se dire au revoir avant que chacun ne monte dans son bus, un jeune garçon ne cessait de les dévisager, le lycéen lui demande alors s’il veut quelque chose de particulier. Le garçon s’éloigne et revient avec un plus âgé, accompagné de cinq autres. Ils attaquent le lycéen à coups de poing et de pied, et lui envoient comme c’est la coutume aujourd’hui des coups de pied dans la tête alors qu’il est au sol. Un de ses amis s’interpose et reçoit un terrible crochet qui le propulse contre le bus et l’assomme. Il est inutile que je précise les origines de chacun des groupes… Deux chauffeurs de bus courageux ont pu s’interposer, et mettre fin au lynchage gratuit. Quand mes filles m’ont rapporté cela, j’ai immédiatement appelé la police, pour leur signaler que si le jeune homme portait plainte, ce dont je doute, ils auraient des témoins.

Dans ma classe de 3e, un jeune d’origine marocaine a organisé l’an dernier, en fin d’année, une expédition punitive contre un autre collégien, qu’il a passé à tabac avec l’aide d’une petite bande de comparses. Il est passé en conseil de discipline et a écopé, grâce au jeu des votes, d’un simple avertissement, qui l’a sûrement beaucoup fait réfléchir pendant les vacances… Il avait aussi menacé physiquement une de mes collègues, en venant se coller à elle, nez contre nez, comme font les boxeurs avant un match. Il a pu revenir gentiment en cours. L’administration nous dit qu’elle le surveille… Bien sûr. Il est retors, et reste avec moi dans une posture de séduction, alors que son comportement est très différent avec certains de mes collègues. Tout le monde semble trouver cela normal, on nous dit juste « méfiez-vous », « faites attention », « soyez prudents »… Ce type de situation pose un certain nombre de problèmes éthiques, et envoie des signaux plus qu’ambigus à la fois aux victimes et aux délinquants. Mais nous n’avons, en tant qu’enseignants, quasiment aucun moyen d’action à part notre charisme propre : interdiction de ne pas accepter un élève en cours, interdiction d’évoquer les problèmes de comportement en conseil de classe et de les porter sur les bulletins, interdiction d’exclure un élève de cours hors incident grave, avec obligation de rédiger un rapport circonstancié et de le faire au moment de l’exclusion, ce qui est souvent difficile - et inutile vu qu’on nous renvoie généralement les élèves quelques minutes après, car personne ne sait quoi en faire… Et le ministère continue avec une lâcheté hypocrite à nous arroser de consignes concernant l’inclusion, l’homophobie, la laïcité, les valeurs de la République et surtout le développement durable, comme si la priorité n’était pas ailleurs, dans la restauration d’une autorité ferme et intransigeante, pour recadrer - ou isoler - tous ces jeunes qui sont totalement en roue libre.

Virginie Fontcalel
Virginie Fontcalel
Professeur de Lettres

Vos commentaires

3 commentaires

  1. Un gouvernement qui ne protège plus son peuple n’a aucune raison d’exister. Quand un mouvement à l’origine pacifiste a tenté d’alerter sur la souffrance des travailleurs, il a été phagocyté et ainsi décrédibilisé. Les élections ont démontré leur inefficacité, le résultat des urnes ayant été ignoré. Adepte de la non violence, il faut donc envoyer un message fort à l’oligarchie soumise à la haute finance pour obtenir raison. Stoppons l’économie, limitons nous aux achats strictement vitaux (nourriture, santé) et en quelques mois, la bête asphyxiée redonnera le pouvoir au peuple.

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