[UNE PROF EN FRANCE] Pour relever le niveau, exerçons notre mémoire !
Face à l’effondrement du niveau en orthographe, en calcul ou en culture générale, une question s’impose : que reste-t-il de l’art d’apprendre ? Alors que les neurosciences révolutionnent notre compréhension des mécanismes de la mémoire, il pourrait être utile de se tourner vers des méthodes éprouvées, parfois vieilles de plusieurs siècles, pour éclairer nos pratiques éducatives modernes. Soyons positifs : proposons des solutions.
Dans l’Antiquité, apprendre par cœur n’était pas un luxe mais une nécessité. Les supports d’écriture, coûteux et rares, obligeaient les esprits à cultiver une mémoire à la fois vive et fiable. C’est ainsi qu’est née la méthode des « loci », « les lieux », autrement appelés les « palais de la mémoire ». Étudiants, orateurs et avocats visitaient un lieu en prêtant attention à chaque détail. Lorsqu’ils devaient apprendre un discours ou un long texte, ils le découpaient en parties, puis associaient chaque partie à un objet ou un symbole qu’ils déposaient ensuite mentalement dans un endroit spécifique de l’édifice de référence. Chaque pièce, chaque recoin devenait ainsi le réceptacle d’une idée ou d’un argument à mémoriser. C’est là l’origine des « loci communes », les fameux « lieux communs » : dans ces espaces incontournables, on plaçait les parties du discours à la fois nécessaires, habituelles et non originales. Elles formaient la base stable et consensuelle sur laquelle pouvaient s’appuyer des arguments plus élaborés et personnels. C’est la méthode qu’a utilisée mon fils aîné, lors de ses révisions pour l’oral de français du bac.
Au XXe siècle, l’Allemand Sebastian Leitner a conçu un outil qui repose sur la répétition espacée. Les « boîtes de Leitner » sont une façon de mettre en œuvre des « autotests distribués » et de favoriser la consolidation des connaissances dans la mémoire à long terme. Laissons Olivier Mottint, d’enseignons.be, nous en expliquer le fonctionnement : « Ces boîtes contiennent plusieurs compartiments numérotés (6, par exemple). À la première utilisation, on place dans le premier compartiment un ensemble d’étiquettes recto/verso. Sur le recto de chaque étiquette figure une unique question : par exemple, s’il s’agit de mémoriser la table de 7, des étiquettes portent respectivement les opérations suivantes « 1 x 7 », « 2 x 7 », « 3 x 7 », « 4 x 7 », etc. Sur le verso figurent les réponses correspondantes. L’élève saisit les étiquettes une par une et s’autoteste, consultant ensuite le verso de l’étiquette pour vérifier sa réponse. Si sa réponse est correcte, l’étiquette est versée dans le compartiment suivant, et ainsi de suite jusqu’au dernier compartiment et, finalement, jusqu’à la « sortie » de l’étiquette de la boîte après le compartiment n° 6. Si la réponse est erronée, l’étiquette est rétrogradée dans le compartiment précédent. » Ce principe exploite des mécaniques essentielles de la mémoire, bien documentées aujourd’hui par les neurosciences : l’effort de rappel, l’autotest et le retour rapide sur information, couplés à un espacement progressif dans le temps, favorisent une consolidation durable des connaissances.
Ces deux méthodes pourraient être réintroduites à peu de frais dans l’école de nos enfants : la mémoire est un facteur prépondérant dans le développement de toutes les autres compétences, mais aussi dans celui de l’esprit critique.
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