[Une prof en France] Système scolaire, un petit tour instructif aux Pays-Bas
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Comme la situation en France est assez désolante en ce moment, tournons-nous un instant vers l’étranger pour regarder comment les choses s’y passent. Une de mes amies a passé de longues années aux Pays-Bas, où ses enfants ont fait toute leur scolarité, à part son petit dernier qui est en France depuis deux ans, et m’a présenté un système qui a retenu toute mon attention.
Au royaume des tulipes et des canaux, on ne s’encombre pas de réformes de façade. Ici, les élèves ne traînent pas jusqu'au bac avant de trouver leur voie. Dès 12 ans, grâce au test CITO, l’avenir scolaire se dessine. Cet examen national est une évaluation rigoureuse des compétences académiques qui, associée au livret scolaire et aux conseils des enseignants, essaie de placer chaque élève sur l'une des trois voies possibles : formation professionnelle (VMBO), enseignement secondaire général (HAVO) ou études pré-universitaires (VWO). Pas de faux-semblant ni d’égalitarisme à outrance : chaque enfant est orienté selon ses capacités dans un parcours qui lui correspond le mieux, tout en laissant la possibilité de changer de voie en fonction de son évolution. Les passerelles sont en effet nombreuses entre les voies, et l’orientation précoce n’est pas une sorte de blocage rigide mais une simple différenciation entre des voies aux frontières perméables. Cela ressemble assez au système antérieur au collège unique, et surtout celui antérieur à 1959, que certains d’entre vous ont connu, avec l’examen d’entrée en 6e et le choix entre le « cours complémentaire », le « collège » et le « lycée » qui, seul, permettait vraiment une poursuite d’études jusqu’à 18 ans et l’accès au supérieur. Comme on a gardé les mêmes noms et les mêmes étiquettes en changeant intégralement leur contenu, on ne s’y retrouve plus vraiment…
Revenons aux Pays-Bas. Le système, qui peut sembler rigide pour certains, est en réalité flexible : des passerelles existent entre les filières pour que ceux qui veulent progresser puissent changer de voie. Ce pragmatisme tranche avec la France, où l’on préfère reporter l’orientation à un âge plus tardif, souvent au détriment des élèves. Résultat : un taux d’échec et de décrochage scolaire bien plus élevé chez nous, alimenté par un égalitarisme de principe qui empêche de répondre aux besoins spécifiques de chaque élève.
Les élèves néerlandais ne semblent pas se plaindre de cette orientation précoce. Les enquêtes internationales, notamment celles de l’OCDE, montrent que les écoliers des Pays-Bas sont parmi les plus satisfaits d'Europe. Le rapport PISA, qui évalue à la fois les compétences académiques et le bien-être des élèves, place les Néerlandais en tête pour leur satisfaction scolaire. Là-bas, on parvient à un équilibre rare entre exigence et bien-être, avec des enseignants qui semblent attentifs à l'épanouissement personnel des élèves.
En France, les élèves, comme leurs parents, ne partagent pas le même enthousiasme. Alors qu’aux Pays-Bas, on privilégie la stabilité et l’efficacité, en France, les réformes se succèdent, souvent sans résultats tangibles.
Ah, autre différence majeure : la présence en cours est vraiment obligatoire. Si vous décidez de partir en vacances un peu plus tôt pour faire des économies sur votre billet d’avion, cela peut vous coûter très cher : l’amende pour absence injustifiée est d’environ 100 euros par jour, auxquels s’ajoutent divers frais. Et c’est appliqué de manière drastique. Elle peut monter à 350 euros par jour dans certaines écoles. Évidemment, sur le papier, en France, cela existe aussi. Le Code de l’éducation a été réformé en 2019 et l'article L131-10 prévoit une amende de 750 euros « pour les parents qui n'assurent pas l'obligation d'assiduité scolaire de leur enfant ». Avez-vous déjà rencontré un parent mis à l’amende pour n’avoir pas mis son enfant à l’école ? Moi, jamais…
28 commentaires
Vous avez raison, la France n’est pas comme tous les autres européens. Les Français se croient supérieur parce qu’ils ont inventé « les droits de l’homme » et qu’ils ont également adopté la fameuse « République ». Mais se prendre pour des esprits supérieures les a amené à la catastrophe.
Pour ma part j’ai passé un examen d’entrée en 6 éme pour un cours complémentaire. En classe de 4 éme j’ai passé un concours d’entré dans une Ecole Nationale Professionnelle (ENP) après 5 ans d’études professionnelles, sortie avec un diplôme. Malheureusement je n’ai pas pu poursuivre des études pour des raisons familiales. J’ai participé au travail aux 30 glorieuses et j’ai toujours eu du travail. Autodidacte j’ai fini ma carrière comme Technicien TCE bâtiment et Travaux publiques. A vouloir faire que des ingénieurs on arrive à faire que des chômeurs professionnels.
L’idéologie égalitariste bien française plombe toute idée d’amélioration de la scolarité. Et quand il se décline par un nivellement par le bas qui veut que l’on fasse poireauter les « bons » élèves au profit du soutien, en pure perte, ceux qui resteront malgré tout médiocres, on se prive de la faculté d’excellence.
Sans parler des élèves qui pratiquent chez eux en famille une langue étrangère car le(s) parent(s) ne parle(nt) pas un traître mot du pays d’accueil, et qui sont bien malgré eux à la traine dans le respect du calendrier du programme scolaire.
0+0 = La tête à Toto…
Encore une loi de plus que personne ne fait respecter.. Vive la France !!..
Un article qui fait rêver…
En France cette loi, comme bien d’autres, n’est pas appliquée. Merci Macron !
Comme vous le faites remarquer, le système néerlandais est proche de ce qui existait dans les années 60 (Transition, Moderne et Classique) en France. Le drame c’est que l’on a cassé ce système au lieu de l’améliorer en prévoyant des passerelles pour se rediriger vers les différentes voies en fonction de l’évolution des résultats dans la voie qui avait été suivi initialement.
J’ai connu ce système. La proportion d’application des passerelles prévues par la loi a été infinitésimale.
J’ai toujours senti, que ce soit durant mes études ou ma vie professionnelle, que rigueur et exigence n’étaient absolument pas incompatibles avec bien être, moments de détente et de « rigolade ». Bien au contraire, si le travail est bien fait, on ressent de la satisfaction et on se sent plus libre, plus dispo pour profiter de moment de convivialité et de détente.
Tellement vrai !
La Suisse voisine procède de façon similaire. N’entrent au lycée que ceux capables de RÉUSSIR des études supérieures. Appliquer ce principe en France permettrait de clarifier nettement la situation dans les universités considérées comme des garderies d’analphabètes financées par le contribuable.
Garderies politisées qui plus est.
Cette façon de procéder est sage, tous ne sont pas aptes à suivre de études secondaires et des tas de métiers leur tendent les bras, sans pour cela déchoir.
Outre le niveau des « analphabètes » inscrits, combien ne le sont que pour bénéficier des avantages auxquels la carte d’étudiant ouvre le droit et ne vont jamais suivre le moindre cours ?
Effectivement, dans les années 50/60, il y avait 2 grandes voies, : le lycée et les collèges techniques. 3 filières dans les collèges techniques conduisaient sur la préparation à un métier, sur le brevet technique et sur la voie de prépa aux « grandes écoles ». Un point dont on ne parle pas : le directeur se faisait un devoir de placer grâce à son réseau avec les entreprises locales tous ceux qui obtenaient le CAP. Il est vrai qu’après la crise de 1929, de nombreux ingénieurs des Arts et Métiers s’étaient convertis dans l’enseignement technique, beaucoup étaient devenus Directeurs de collèges ou chefs des travaux, de nombreux inspecteurs de ces collèges étaient également Gadzarts. On a cassé le jouet qui marchait très bien pour en faire quoi !!? On se le demande.
Le lien entre les enseignants et les entreprises facilitait le recrutement de candidats par les patrons. De nos jours, les mêmes patrons refusent d’accepter en stage des élèves de lycées professionnels au prétexte d’absentéisme, d’absence avérée d’intérêt et… de pillage massif du matériel et du stock de l’entreprise.
Bon exemple à suivre
petit détail : le collège conduisait au bac, tout comme le lycée, quand au cours complémentaire, ce nom a disparu…
Le collège conduisait au bac : pas vraiment. Dans mon collège, un ancien cours complémentaire, il y avait quatre classes de sixième, trois de cinquième, deux de quatrième et une et demi de troisième, la demi préparant le concours d’entrée à l’Ecole normale d’instituteurs (et donc au bac puisque l’on devenait instituteur à bac + 1) et l’autre n’envoyant qu’une petite partie de ses effectifs en lycée.
Lire « Stupéfiant voyage à travers l’Education nationale ».
Jusqu’en 1970, trois voies en collègue, une voie dite 3 ou préprofessionnelle, préparait l’accès au CAP ou à l’apprentissage à la sortie du collège.
La voie 2 assurait la continuité du collège jusqu’au BEPC, vers un BEP généralement…
La voie 1 pour ceux aptes à assurer leur scolarité en lycée…
Mais Bourdieu aidant, le plan Langevin-Wallon (communiste-fin guerre 1945 ==> le BAC pour tous), la sélection fut considérée uniquement comme ayant pour cause l’origine sociale.
Il est vrai qu’il y a une cause sociale, mais il ne fut pas envisagé de moyen pour la corriger, au contraire, les concours pour les bourses furent supprimés au profit de bourses sociales…
La lecture réelle (pas celle que l’on trouvait sur le site du MEN) de la réussite de la Finlande en donnait les lignes…
Attention à ne pas comparer un pays à une autre sur un seul critère. Les Pays bas sont sans conteste un modèle dont il serait bon de s’inspirer mais ce qui peut fonctionner en ce pays ne vaut pas forcément dans le notre.
Réflexe très français, éviter les comparaisons, chez nous c’est différent !
Et bien justement, que chaque Ministère français fasse des analyses comparatives (benchmarking), c’est à dire analyser, comprendre pourquoi tel ministère fonctionne mieux en Allemagne qu’en France avec 30% de moins de personnel (Éducation nationale), idem pour les Dépenses sociales etc …
Il y a là des gisements d’économies.
N’oublions pas de comparer la durée de fonctionnement des établissements scolaires (en Norvège, mes neveux – en vacances depuis le 29 juin – sont rentrés dès le 19 août…), la durée d’ouverture au quotidien et la durée de chaque cours.
Je suis d’accord avec vous
Des proches étudient aux Pays-Bas y ont passé le bac international et l’un est revenu faire une grande école de commerce en France et l’autre continu à la fac là-bas, les études sont très bien faites, le niveau est bien supérieur à la France, enfin le mot clé est la discipline. L’orientation professionnelle vers 12 ans c’est assez aventureux quand même parce que les ados ne murissent pas tous de la même manière et plus ou moins tôt. Je suis de la grande époque de l’orientation professionnelle, j’avais donc passé les tests et les résultats devaient être tellement catastrophiques, que les « spécialistes » disaient que je ne ferais jamais rien, que j’étais impossible à classer quelque part et leur avaient même conseillé de m’emmener voir un psy, c’est pour dire. Enfin j’ai exercé une profession bac + 8 j’ai créé un cabinet de profession libérale, j’ai passé encore quelques autres diplômes au fil du temps pour être toujours au top et j’ai été reconnu dans la profession. Il est donc évident qu’en France l’enseignement étant différent ce genre de décision pour orienté la vie d’un pré-ado de 12 ans ayant souvent de graves lacunes en français et en maths est très aventureuse.
Et pourquoi pas ? Qu’en savez-vous que cela ne pourrait pas fonctionner en France si c’était appliqué d’une manière ferme, loin de tout corporatisme syndical ?
C’est le si qui me gène, je parle du moment présent
ah bon ? et pourquoi donc ? Pourriez vous développer ?
« Corporatisme syndical » : l’explication est fournie…