Union européenne : ce rapport qui veut bazarder nos histoires nationales

À trois mois des élections européennes, beaucoup d’informations, qui avaient pu nous échapper, remontent, fort à propos, sur le travail des eurodéputés à Strasbourg. Elles devraient permettre d’éclairer les électeurs dans leur choix du 9 juin, plus peut-être que les discours des uns et des autres. Ainsi, en décembre dernier, on apprenait que les drapeaux nationaux étaient désormais proscrits des pupitres au Parlement européen. Anecdotique ? Non, symptomatique. Preuve en est ce « Rapport sur la conscience historique européenne » rendu en décembre 2023, présenté par la députée allemande Sabine Verheyen, présidente de la Commission de la culture et de l’éducation au Parlement européen. En quelque sorte, un petit chef-d’œuvre de wokisme qui dit vers quelle Europe l’on veut nous conduire. Lisez-le (il n'est pas trop long) pour vous en rendre compte par vous-même.

L'Union européenne, une religion du vide

Samedi dernier, Valérie Hayer, lors de son meeting de Lille, n’hésitait pas à résumer cette élection à un choix manichéen très simple : « Il y aura d’un côté ceux qui croient en l’Europe et de l’autre ceux qui n’y croient pas. » Les gentils, les méchants. Donc, l’Europe – entendez l’Union européenne – relève de la croyance. C’est une religion. Mais une religion du vide, si on lit ce rapport qui a été approuvé par les députés Renew, c’est-à-dire par le groupe dans lequel siège la Macronie. Ou plutôt une religion qui veut faire le vide. Le rapport « invite les États membres à actualiser leurs programmes d’études […] existants afin de faire passer l’histoire européenne et mondiale avant l’histoire nationale, et de mettre davantage l’accent sur une compréhension supranationale de l’histoire, notamment en permettant des perspectives multiples sur l’histoire. » Ce n’est qu’une « invitation », mais on sait ce qu’il en est, à terme, des « invitations » de l’UE… En clair, c’est bien un encouragement à faire passer au second plan l’histoire de nos nations, pour ne pas dire une incitation à la bazarder aux encombrants. L’on pourrait alors se dire que l’idée portée par cette injonction est de retrouver ce que les nations européennes (on parle des « États membres » pas des nations, bien entendu) ont en commun : des racines, une culture, une civilisation, que sais-je encore… Du tout. Puisque ce rapport « reconnaît qu’il est fondamental d’examiner le passé de l’Europe à la lumière des valeurs européennes fondamentales consacrées à l’article 2 du traité de l’Union européenne ». « Consacrées » : religion ! Et que sont ces valeurs consacrées à l’article 2 ? « L'Union est fondée sur les valeurs de respect de la dignité humaine, de liberté, de démocratie, d'égalité, de l'État de droit, ainsi que de respect des droits de l'homme, y compris des droits des personnes appartenant à des minorités. Ces valeurs sont communes aux États membres dans une société caractérisée par le pluralisme, la non-discrimination, la tolérance, la justice, la solidarité et l'égalité entre les femmes et les hommes. » Tout cela est juste et bon, mais sans doute un peu court et, somme toute, très général. Des valeurs universelles que l'on peut plaquer partout dans le monde mais qui ne sont pas « incarnées », à l’image d’ailleurs des figures représentées sur les billets de banque en euro.

Rien sur les racines chrétiennes, bien sûr...

Une lueur d’espoir apparaît, cependant, au virage d’une phrase du rapport : « Comme l’a rappelé Jacques Delors à juste titre à plusieurs reprises, les citoyens européens ne peuvent pas tomber amoureux du marché unique… » Mais un espoir vite déçu lorsque, quelques lignes plus bas, on lit ceci : « Dans une perspective historique, nous ne devrions pas considérer l’Europe comme une civilisation et un espace géopolitique homogènes… » Il n’y a donc pas de civilisation européenne aux yeux des rédacteurs de ce rapport. On aurait pu imaginer – rêvons deux secondes – faire passer l’histoire européenne avant les histoires nationales pour évoquer Athènes, Rome... le christianisme. Mais non. Même pas. Rien. En revanche, pour ce qui est de se flageller sur les turpitudes du passé, y compris le colonialisme, le rapport tartine à l’envi. Mais ça, il fallait s’y attendre.

Quelques précisions, pour finir. La « rapporteure » Sabine Verheyen est membre du PPE et, en Allemagne, de la CDU, le Parti chrétien-démocrate… Ce rapport a été approuvé à la majorité des membres présents de cette commission culture et éducation (soit les élus du PPE, à une exception près qui s'est abstenue. Renew, socialistes et écolos ont voté pour. Conservateurs, RN ainsi que le député de gauche français, l'ancien socialiste Emmanuel Maurel, ont voté contre). Au passage, on ne peut qu’inviter les évêques de la Commission des épiscopats de la Communauté européenne à lire ce rapport, eux qui en appellent aujourd'hui à « un vote responsable encourageant les valeurs chrétiennes et le projet européen »… Encourager une chose et son contraire : il fallait le faire !

Georges Michel
Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

Vos commentaires

42 commentaires

  1. Il semble totalement aberrant de vouloir gommer ou modifier l’Histoire nationale de chacun des Membres de l’UE au prétexte de persévérer dans la construction dite européenne. On ne refait pas l’Histoire, ni celle des moments de progrès ni celle de ses terribles dérives. Le risque et l’évidence consistent à se tirer des obus dans les pieds ou même dans la tête. Madame Van der Leyen voudrait-elle faire passer par profits et pertes les horreurs pratiquées, il y a peu encore, par son propre Pays qu’elle ne le pourrait pas. Il serait tellement plus positif de cesser cette vaine course aux sorcières et de tenter de faire profiter chaque Nation de ce que ses voisines ont de meilleur au lieu d’échaffauder un machin qui ne repose que sur les sables.

  2. Que les tenants de ce rapport ailles se faire voir ailleurs ! Pourquoi ? Parce que l’Europe a une histoire depuis plus de 5000 ans et fait partie de la civilisation Gréco Romaine depuis plus de 5000 ans ! L’Europe est une civilisation, mais d’une telle diversité, qu’elle n’a pas sut se réunir et s’entendre ! Je conteste ce rapport de cette commission ! Amitiés à tous Hervé de Néoules !

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