Urgence d’un moratoire sur les charges sociales

poches vides

Jeudi soir, Emmanuel Macron a annoncé, parmi de nombreuses mesures, la possibilité pour les entreprises de reporter, sans formalités ni pénalités, le paiement des taxes, impôts et charges au titre du mois de mars 2020. Cette mesure est nécessaire, mais gravement insuffisante. Elle est marquée par l’ignorance du fonctionnement des PME et TPE, dont les difficultés ne pourront pas être réglées par une mesurette de ce type.

Les petites et moyennes entreprises, les professions libérales et les commerçants et, d’une manière générale, tous les indépendants, sans oublier les agriculteurs, sont obsédés par une contrainte quotidienne : d’abord payer leurs salariés chaque mois, ensuite payer les charges afférentes à ces salaires et, enfin, se payer eux-mêmes. Un salaire net coûte le double à l’employeur, qui reverse la même somme à titre de charges sociales. En période tendue, lorsque la trésorerie fait défaut, c’est une angoisse. Un client qui fait faillite, le paiement d’une grosse facture décalé parce que le comptable est malade ou en vacances, un prélèvement bancaire mal anticipé, et c’est le paiement des salaires qui est compromis. Avec, à la clef, des conséquences humaines graves pour les familles.

Bien entendu, et tous les chefs d’entreprise le savent, il ne faut pas compter sur les banques. Lorsque le découvert maximum est atteint, rares sont celles qui ferment les yeux sur un dépassement.

L’accumulation des événements depuis la fin 2019 inquiète, à juste titre, les chefs d’entreprise et les indépendants. Les grèves à répétition, la conjoncture morose et, maintenant, le coronavirus ont des conséquences. La fermeture des écoles pose une question simple : comment faire pour travailler avec des enfants à côté de soi ? Hormis prendre une baby-sitter – même une ado payée en espèces coûtera 80 euros par jour -, comment faire sans interrompre son activité ?

Mais les URSSAF, elles, n’interrompront pas leurs appels de cotisations. Ni les caisses de retraites, ni l’administration fiscale. Un report est une solution lorsque l’entreprise connaît un décalage de trésorerie. Pas quand elle va subir, et nous le savons déjà, une baisse de son chiffre d’affaires qu’elle ne compensera pas les mois suivants. Une entreprise juste à l’équilibre et sans trésorerie ne peut pas tenir.

Alors, il n’y a pas d’autre solution qu’un moratoire. Il est indispensable, si le gouvernement veut éviter des faillites en cascade, de suspendre durant quelques mois un certain nombre d’obligations sociales et fiscales. Nous ne tiendrons pas autrement. Cette charge représente une part importante de nos charges d’exploitation. Elle ne profite pas directement à l’activité économique, au contraire des loyers ou des fournisseurs qu’il faut continuer de payer. À cela il faut ajouter un moratoire sur les remboursements bancaires dès lors que les entreprises justifient de difficultés présentes ou raisonnablement envisageables. Les banques ne sont pas nos amies, contrairement à ce qu’elles prétendent. Elles ne sont pas là pour financer notre activité et sont dépourvues de tout scrupule lorsque notre situation est en péril.

Bien entendu, tout cela a un coût, considérable, qui tient au poids des prélèvements dans notre pays. Et il n’existe pas d’autre possibilité que de le financer par un déficit budgétaire déjà abyssal. Qu’on ne nous dise pas que c’est impossible. À d’autres époques, l’État a injecté des milliards pour éviter aux banques une faillite programmée. Et prendre le risque de faillites en cascade au nom de l’équilibre budgétaire n’est tenable ni économiquement, ni socialement, ni humainement.

Reste à savoir si les technocrates qui nous appliquent les directives d’autres technocrates prendront conscience du risque que représente le maintien, dans les prochaines semaines, d’un système oppressant de prélèvements obligatoires insupportable en période de crise. Réponse dans les prochains jours.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 19/03/2020 à 10:55.

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