Valérie Pécresse au Zénith : anatomie d’un naufrage

Pécresse

Valérie Pécresse tenait, hier, son grand meeting de campagne au Zénith de Paris devant 7.500 militants. Il devait relancer une candidature qui patine dans les sondages : objectif raté. Emmanuel Macron a même peut-être pris, hier soir, son ticket définitif pour l’Élysée. Ce meeting risque de rester dans les mémoires comme le naufrage d’une candidate qui pouvait prétendre au second tour. Commençons par ce qui a marché : une salle immense, pleine. Une scène magnifique, des drapeaux, des jeunes, une vraie ambiance. On a scandé « Pécresse Présidente » jusqu’à la fin. Les troupes étaient là, elles étaient gonflées à bloc. « L’ambiance était excellente, c’était techniquement magnifique, cela m’a rappelé les grandes heures de Sarko et de Chirac », raconte un chiraquien historique. Tout allait donc très bien jusqu’à l’arrivée de la candidate sur scène.

Dès les premiers mots, son discours a révélé les failles de Valérie Pécresse mieux que ne l’auraient fait ses opposants politiques. Il a montré d’abord une certaine solitude : dans les rangs de LR, on reproche à Valérie Pécresse de fonctionner avec quelques fidèles un peu coupés du monde. Cela pourrait expliquer qu’un texte aussi mauvais ait pu arriver jusqu’au pupitre de la candidate au moment le plus crucial de la campagne, à deux mois de l’échéance. Même dans le camp de Valérie Pécresse, hier soir, les fidèles avouaient leur dépit. « Le plan manquait, ce n’était pas écrit de manière pédagogique, pas de ligne directrice », regrette notre chiraquien, qui n’est pas si sévère, cependant. « Zemmour aussi était très mauvais à ses débuts, il a beaucoup progressé : elle n’était pas pire que Merkel, elle a du mérite, elle se force, elle est courageuse. »

Certes, mais le courage ne fait pas tout. On a entendu l’élève Pécresse, bonne dernière de la classe d’éloquence, ton monocorde et sourire gêné. Et il y avait pire que le ton catastrophique, dans ce discours, c’était en effet le fond : pas de structure, pas de lignes de force, pas de choix dans les idées développées. Un catalogue interminable de mesures électoralistes empilées les unes sur les autres et une belle guirlande de lieux communs. Petit florilège : « Contre les zigzags, nous choisissons les lignes droites ! » C’est vrai que c’est mieux… « Nous sommes à la croisée des chemins » : plus bateau, on coule. « Ces racines qui se donnent des ailes », toute référence à une émission de télévision, etc. « Si vous avez échoué, c’est que vous avez tenté. » Bien vu ! Terminons par ce conseil aux jeunes : « Contre l’immobilisme, choisissez l’action ! » L’art oratoire était absent, hier, du Zénith…

Valérie Pécresse a aussi beaucoup emprunté à d’autres dans son discours, comme si les recettes du succès des autres lui garantissaient le sien. « Pas de fatalité ni au grand déclassement, ni au Grand Remplacement », a lancé la candidate LR. Courageux, mais emprunté à Éric Ciotti et surtout à Éric Zemmour ! « Un pavé de charolais arrosé d’un bon vin, c’est la France autour de la table » : merci au candidat communiste Fabien Roussel ! « Moi aussi, présidente de la République, je vous défendrai » : merci au célèbre « Moi Président » de François Hollande. « Les Français ne vivront plus ensemble mais face à face » : merci à Gérard Collomb ! On a vu beaucoup de monde derrière les mots de ce discours, sauf une certaine… Valérie Pécresse. Pour les militants venus au meeting, elle reste une inconnue.

Elle a pourtant tenté de se raconter en fin de discours, comme l’avait fait Marine Le Pen, à Reims. Moment intimiste : Valérie Pécresse parle de son mari et de ses enfants, de ses souffrances et de ses pudeurs, de ce qu’elle veut dire d’elle et de ce qu’elle ne veut pas dire. C’était réussi chez Le Pen, à qui elle a repris l’idée de toute évidence, mais pas au Zénith. Au contraire, dans l’échelle du gênant, on gravit encore plusieurs barreaux. Très à son avantage durant les primaires LR, lorsqu’il s’agit de montrer sa connaissance technique des dossiers, Valérie Pécresse n’est pas douée pour enflammer la foule. Ce 14 février au matin, sur RTL, la candidate LR avouait ses difficultés avant de retourner l’argument : « Il y avait énormément de monde, la salle était dure à prendre et si vous voulez des orateurs, il y en a plein dans la campagne. Moi je suis une faiseuse. » Il faut davantage qu'un discours raté pour clore la carrière d'une personnalité politique, mais ce ratage tombe mal pour les présidentielles. Les sondages diront très vite si oui ou non les Français lui en tiennent rigueur, transformant sa campagne en chemin de croix.

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Marc Baudriller
Directeur adjoint de la rédaction de BV, éditorialiste

Vos commentaires

114 commentaires

  1. Depuis les primaires, elle »n’imprime » pas . Des propositions dans tous les sens rendues incompréhensibles, une conviction « forcée », pas de véritable empathie, etc.. Le pompon fut ce meeting, on avait l’impression d’une élève de 6° récitant le Cid ! Son vrai problème, à mon avis, réside dans son va et vient pour satisfaire les LR Ciottistes et les centristes mous racolés par Sarkozy sous l’UMP. Equation impossible et le résultat probable sera une implosion des LR.

  2. Madame Pecresse en pantalons, les mains dans les poches. Cette attitude, quelle veut sans doute populaire mais qui est quand même un peu « ordinaire » pour ne pas dire vulgaire, ne lui va pas du tout ne lui va pas et montre bien qu’elle « compose » et a bien du mal à être elle-même.

  3. Je pense que ce meeting raté de Valérie Pécresse pose un problème bien plus général: les hommes ou les femmes politiques ont pris l’habitude de faire écrire leur discours par des « plumes », gens prétendument brillants, et après ils lisent. Et ça, ça va pas du tout : l’impression d’entendre des perroquets ne faisant que répéter une pensée prémâchée.

  4. Crier n’est pas convaincre, mais si elle se plante c’est pain béni car il n’y a rien de bon à attendre d’elle et elle laissera la place à un patriote pour le 2ème tour.

  5. Elle ne s’attendait pas à gagner la primaire LR, tout comme Trump lorsqu’il découvrit qu’il avait remporté l’élection. Mais la différence est que Pecresse n’a pas de véritables convictions. Cela se voit et s’entend

  6. Ce naufrage est l’aboutissement du chiraquisme. La trahison du gaullisme pour se soumettre à la gauche et à Bruxelles, pour tomber dans le néant macronien. Faute de la charpente idéologique du gaullisme, L’UMP/LR n’a fait que se dissoudre dans des rivalités personnelles en s’enfonçant au mieux dans la « bonne gestion  » au pire dans les petites affaires. Sarko absent de ce meeting, au fond, ça résume tout.

  7. Quelle que soit le poste ou la fonction que l’on brigue, le simple savoir, aussi élevé soit-il, ne suffit pas. Il faut un savoir faire, et surtout un savoir être. Mme Pécresse est sûrement dotée d’un grand savoir de part ses brillantes études, et d’un certain savoir-faire du fait des fonctions occupées. Mais au niveau du savoir être, elle montre des faiblesses évidentes : empathie, sens du contact, franchise dans ses positions et ses convictions, vision pour le pays…Où est-elle ? Nulle part.

  8. les commentaires de bvd Voltaire m’interpellent ! vous voulez du bonimenteur ? du discoureur de talent ? un harangueur de foire ? et qu’importe ce qu’il fera s’il parle bien ? en fait vous faites de manière subliminale de la propagande pour macron !! je ne vais pas voter pour Pécresse mais il me plaît de croire que le fond, le projet politique, est plus important que la forme, sacrebleu !!

    • Ce n’est pas un bonimenteur que les gens espèrent, mais un homme ou une femme de conviction, capable de transmettre sa vision pour la France. C’est un exercice réussi quand le public entre en communion avec l’orateur, quand la ferveur s’empare du public. Il doit y avoir de l’émotion pour susciter l’adhésion. Or, rien de tout cela ne s’est produit lors de ce meeting.

    • Vous avez raison. Le bonimenteur (très menteur), le comédien, le harangueur, le séducteur, on a vu parfaitement avec Mac’ ce que ça donnait. Mais il faut bien voir que sa combine pour se faire élire a fonctionné, seulement par un concours de circonstances extraordinaires dans un moment assez particulier. Pas sûr que ça marche 2 fois de suite.

  9. Un grand meeting qui devait porter Pécresse au Zénith , en fait il n’en est rien. Une Technocrate laborieuse qui a débité des phrases creuses. Pas une grande oratrice, on l’a vu ,mais pire c’est que son ADN dit le contraire de ses phrases. Question identité , immigration, elle est sur la même ligne que Macron. Le Karcher est à la cave et il y restera . Elle se réclame de Merkel , Super , c’est celle qui a accepté plus d’un million de migrants. On a besoin d’un(e) chef(fe) pas d’une DRH hésitante

  10. Dans ma contrée, le sobriquet pour une V. Pécresse c’est « La courge ». Quant à Macron, le calculateur froid, cynique et foncièrement arrogant, je n’ose écrire ce qu’il en est par crainte de censure.

  11. Bon, c’est vrai, son discours a été nullissime. Elle n’a aucun talent oratoire, c’est évident. Mais tout le monde s’accorde pour reconnaître qu’elle connaît parfaitement ses dossiers. Pour ma part, je préférerais voir la France gérée comme elle a géré sa Région que comme une Hidalgo a géré Paris. Après, chacun ses goûts. En 2017 la France s’est choisie un président qui devait « changer la donne ». Il présentait bien, style « gendre idéal. Il savait parler, lui. On voit le résultat.

  12. Le slogan LR:
    Vous avez aimé Macron, vous allez adorer Pécresse!
    Souvenons-nous de toutes leures trahisons au moment de passer dans l’isoloir.

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