Valls, Borne et les autres : ministres de l’état de la France !

Capture d'écran France Inter
Capture d'écran France Inter

Quatre ministres d’État ! Pas moins. François Bayrou s’offre donc quatre ministres d’État dans son gouvernement dont il se dit très fier (heureusement !) : Manuel Valls, Élisabeth Borne, Gérald Darmanin et Bruno Retailleau. Ce titre prestigieux de ministre d’État, hérité de l’Ancien Régime tout comme les dorures des palais nationaux, les trompettes du régiment à cheval de la Garde (républicaine) et la grâce présidentielle, n’avait pas été relevé depuis la démission, le 16 juillet 2019, pour cause de homard au menu de l’hôtel de Lassay, de François Goullet de Rugy, ministre de la Transition écologique et solidaire. On était au bout du bout de la période bleue du macronisme, l’affaire Benalla et les gilets jaunes étant passé par là, histoire d’essayer de faire revenir tout ce petit monde à la réalité.

Ministre d’État : un titre qui en jette

Ministre d’État : un titre qui ne donne ni plus de gratifications ni plus de pouvoir, mais qui en jette et offre une préséance sur les collègues de gouvernement. Ne jamais oublier que les symboles donnent du pouvoir ou, tout du moins, l’illusion du pouvoir. Emmanuel Macron, durant son interminable règne, n’avait eu jusqu’à maintenant que trois ministres d’État. Ce pauvre Gérard Collomb, d'abord, depuis disparu, premier grand feudataire à avoir rallié le Grand Marcheur de France, après des décennies de bons et loyaux services dans les cuisines socialistes de Lyon. Une sorte de bâton de maréchal. Nicolas Hulot, ensuite, à qui le titre allait comme un costume trois-pièces à un explorateur de terres inconnues. Mais ce règne s’annonçait résolument écologique, à défaut d’être écologiste et, donc, il fallait bien marquer le coup. Et le troisième, après la démission de Hulot et un rapide échange standard, Rugy, cité plus haut, qui avait la chance d’avoir l’estampille écologiste. Depuis, plus de ministres d’État. Cela dit, on voit mal à qui Macron aurait pu conférer ce titre qui, sous la Ve République, fut tout de même porté par André Malraux qu’on ne présente pas, Gaston Palewski, directeur de cabinet du général de Gaulle à Londres et qui épousa, sur ses vieux jours, une Talleyrand-Périgord (cela ne donne ni titre ni compétence, mais en dit beaucoup sur ces personnages de la Ve des premiers temps), André Michelet, dont le procès en béatification fut introduit à Rome en 2006, ou encore – histoire de ne pas oublier la gauche - Gaston Defferre, le dernier homme politique français à s’être battu en duel, ou encore Roland Dumas, avec qui, lorsqu’il était aux Affaires étrangères, la voix de la France était encore respectée. Sic transit gloria mundi !

Alors que les heures de ce gouvernement sont peut-être comptées...

François Bayrou est aujourd’hui le « Premier ministre d’État », pour reprendre le titre officieux que portèrent Sully, ministre d’Henri IV, l'idole de Bayrou (!), Richelieu ou encore Mazarin. Et, en obtenant du président de la République que quatre de ses ministres soient ornés de ce titre prestigieux de ministre d’État (pour qui a encore la mystique de l’État), l’orgueilleux Béarnais rehausse par là même sa propre position. Il ne faut pas y voir autre chose. La dernière fois qu’il y eut quatre ministres d’État (Simone Veil, Charles Pasqua, Pierre Méhaignerie et François Léotard), c’était dans le gouvernement Balladur, de 1993 à 1995. Sous le règne de Mitterrand. Bayrou était alors un « modeste » ministre de l’Éducation nationale.

Donc, quatre ministres d'État (dont trois qui ont largement contribué à ce que la France devienne ce qu'elle est aujourd'hui), cela en impose. Cela donne l'impression de renouer avec la grande tradition, d'inaugurer une sorte de restauration de l'État, d'ouvrir une période de grande stabilité. Comme aux grandes heures. Soyons fous : on est en janvier 1959 ! Alors que les heures de ce gouvernement sont peut-être comptées. On connaît cette phrase cruelle du général de Gaulle, dans ses Mémoires, au sujet d’Albert Lebrun, président de la République, lorsque éclata la Seconde Guerre mondiale et que la France s’effondra : « Au fond, comme chef de l'État, deux choses lui avaient manqué : qu'il fût un chef ; qu'il y eût un État. » Aujourd’hui, nous avons quatre ministres d’État. Nous avons encore un État. Semble-t-il, puisque l’impôt est encore levé, y compris dans les provinces (de nos jours, on dit « territoires ») les plus reculées. Mais dans quel état ?

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Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

Vos commentaires

10 commentaires

  1. Ministres des (petits) tas, vous savez ceux que nous font les chevaux. Rassurons nous, malgré toutes les craintes cataclismiques exprimées par les chroniqueurs des France machins sur une prochaine censure, je ne leur prédis pas une longue vie.

  2. Le gag un jour ministre du budget , le lendemain ministre de l’intérieur, et le surlendemain ministre de la justice ….tout cela pour un seul homme . Seul problème, il n’y connaît rien dans ces différents domaines .
    j’ai jamais vu d’avocat passer policier puis comptable

    • Bien que dans bon nombre de cas ils pourraient le faire. Les difficultés commenceront lorsqu’il faudra nommer un balayeur de cours. Là il y a un test pour les droitiers et un autre pour les gauchers. Les ambidextres ou « centristes » tiendront la pelle.

    • C’est vrai que ce fac simile de gouvernement qui occulte pas moins de 20 millions d’électeurs sur 32 ayant exprimé leur vote..Est une véritable claque pour nous les contribuables inquiets depuis longtemps de l’état du pays..tous ces gens pourvu qu’ils aie le nez dans la gamelle se moquent de nous..tout ça ne peut que mal finir…

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