Vers un monde sans contact ?
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J’ai fait un rêve. Mais contrairement à celui du pasteur Martin Luther King, le mien n’était pas porteur d’espoir dans un avenir plus fraternel, bien au contraire !
Dans un univers enfin aseptisé, préservé de la circulation des virus, microbes et autres bactéries, les hommes vivaient en parfaite harmonie sans jamais se rencontrer physiquement.
Les entreprises imposaient le télétravail, organisant réunions, échanges et colloques par vidéoconférence et accumulant ainsi moult avantages, non seulement sanitaires mais aussi financiers : inutile d’entretenir de coûteux bureaux, cantines et lieux de rencontre entre salariés, propres à engendrer des mouvements contestataires préjudiciables au bon fonctionnement des établissements.
Il en allait de même pour les écoliers, lycéens et étudiants, dont les cours étaient dispensés à distance par des enseignants soulagés de ne plus affronter des enfants et des jeunes gens préférant chahuter que suivre la démonstration d’un théorème, écouter un exposé sur Victor Hugo ou se passionner pour les exploits guerriers de Jeanne d’Arc.
Magasins, restaurants, cafés, théâtres, cinémas, salles de concert et de sport avaient définitivement disparu, remplacés par les livraisons à domicile, les diffusions de pièces, films et récitals via la télévision, les disques et les réseaux Internet. Quant à la culture physique, chacun pouvait la pratiquer chez lui devant son écran, où un aimable entraîneur prodiguait les conseils idoines pour conserver une forme olympique et une silhouette de mannequin.
La libération des locaux occupés par les activités ci-dessus décrites permettait l’hébergement des personnes sans domicile fixe et des populations jeunes et entreprenantes venues d’Afrique et d’Asie, dont l’installation ne cessait d’être facilitée pour compenser une natalité autochtone en chute libre, malgré les mesures encourageant la reproduction en laboratoire, protégée des risques liés aux relations charnelles.
Sur le plan écologique, la fin des déplacements jadis nécessités par les trajets domicile-travail, les courses et les voyages touristiques avait entraîné une amélioration providentielle de la qualité de l’air et une diminution notable des émissions de gaz carbonique (CO2).
Autre effet positif de ce nouveau mode de vie, la délinquance et la criminalité baissèrent considérablement, chaque citoyen étroitement surveillé végétant seul dans un espace clos, ne communiquant avec ses semblables que par téléphone ou ordinateur interposé.
Je me suis réveillée avant de découvrir les moyens de subsistance de cette humanité enfin libérée des dangers de la vie en communauté, mais fort rassurée qu’il s’agisse d’un songe : si nous voulons éviter que ce cauchemar ne devienne réalité, il est urgent d’entrer en résistance contre les bonnes âmes qui prétendent vouloir notre bien…
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