Vingt-six ans après la fin de la conscription en France, l’armée française face à de nouveaux défis
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C'était un 28 mai, le 28 mai 1996 pour être précis. Jacques Chirac annonçait ce jour-là que la conscription, c'est-à-dire le service militaire obligatoire, allait être suspendue - pas supprimée, précision qui a son importance. Les raisons qui avaient présidé à cette annonce étaient nombreuses et de divers ordres. Tout d'abord, la fin, en 1992, de l'URSS avait, dans l'esprit du temps, laissé croire à une paix perpétuelle que ne rompraient, çà et là, que des expéditions en Afrique, menées par des troupes d'infanterie légère. Il n'y avait, pour les analystes politiques de l'époque, aucune raison de croire à la résurgence d'une menace d'affrontement majeur. Rétrospectivement, il est difficile de leur en vouloir. Ensuite, l'idée de Chirac était de professionnaliser nos forces armées, c'est-à-dire d'en finir avec le modèle à deux vitesses qui mettait dos à dos des troupes d'élites presque entièrement professionnalisées (troupes de marine, parachutistes, Légion étrangère), destinées à la guerre proprement dite, et des troupes d'amateurs, porteuses de numéros de série peu prestigieux et affectées dans des garnisons peu enviables. Les armées occidentales peuvent être divisées, depuis bien longtemps, en 20 % de fanatiques faits pour le combat et 80 % de cas sociaux rééduqués par l'institution militaire. Le projet était, cette fois, de faire de l'armée un véritable métier. La troisième raison, sous-jacente, était sans doute un peu moins avouable. L'immigration commençait, en ce mitan des années 90, à poser problème. On était déjà loin des enthousiasmes puérils de l'antiracisme à la Mitterrand, avec ses mains jaunes, ses concerts festifs et sa propagande pour simplets. Les attentats islamistes du GIA, en 1995, avaient ensanglanté Paris. La proportion de jeunes gens qui, bien que détestant la France, étaient susceptibles d'en porter les armes par obligation légale posait problème.
Zoom avant jusqu'en 2022 : à quoi servait de supprimer la conscription ? Face au conflit ukrainien, en cohérence avec la vision stratégique (assez prophétique, d'ailleurs) de l'actuel chef d'état-major des armées, la France redécouvre la menace d'un engagement majeur, c'est-à-dire d'une vraie guerre. Les expéditions légères en Afrique ont vécu : le Mali a unilatéralement chassé, sans excès d'élégance, le contingent français qui lui a pourtant sacrifié des dizaines de ses soldats, et il y a peu de chances qu'un continent désormais dominé par la Chine et la Russie rappelle un jour d'anciens colons qu'il a appris à haïr. Les opérations de maintien de la paix pour le compte de l'ONU (au Liban, notamment) entretiennent une présence symbolique, pas davantage. La prochaine guerre, contre un ennemi de rang équivalent voire égal, sera peut-être totale : ce sera un terrible Moloch qui engloutira dans ses fournaises des centaines de vies de soldats. Nous ne sommes probablement pas prêts à l'entendre, mais c'est ainsi. La Russie, par exemple, aurait perdu approximativement 25.000 hommes en Ukraine, selon les estimations les plus prudentes.
La professionnalisation, elle, n'a pas fait disparaître le clivage fondamental, au sol, entre « troupes combattantes » et « arrière » : malgré le sacrifice de nombreux soldats des armes dites de soutien, les troupes de mêlée continuent de fournir la totalité des grands chefs de l'armée de terre et les unités d'appui (artillerie, génie) ou de soutien (train, matériel) continuent de servir dans l'ombre, sans moyens ni gratitude. Par ailleurs, malgré la disparition provisoire des lignes de front, le décalage des recrutements entre élite et masse ne s'est pas réduit : selon les chiffres de la presse (L'Opinion, 19/5/2015), le taux de sélection est en moyenne de trois candidats pour une place, toutes catégories confondues. Il descend jusqu'à 1,6 pour certaines spécialités, mais remonte jusqu'à 9 pour 1 dans la Légion étrangère. Le pourcentage de 20 % de guerriers pour 80 % de cas sociaux rééduqués semble toujours pertinent et explique peut-être la fascination des parlementaires pour un « tout Forces spéciales » au Sahel, comme l'avait montré un rapport de 2014 (désormais largement révisé par un nouveau rapport de 2022) : en confiant toutes les missions à des soldats d'élite, on les épuise et on leur fait faire n'importe quoi, mais on achète une sérénité provisoire.
Enfin, les enjeux liés à l'immigration ne se sont pas, loin s'en faut, évanouis : bien que le Grand Remplacement soit officiellement une théorie d'extrême droite, les exigences religieuses (alimentaires, d'adaptations liées au ramadan, etc.) ont donné lieu à la création de rations halal, produites en nombre. Il faudrait demander aux militaires si le ramadan donne lieu à des demandes d'horaires adaptés. Enfin, les cas de militaires refusant de se battre en Afghanistan ou partant rejoindre la Syrie après leur contrat, bien qu'il s'agisse de cas isolés, posent la question de la pertinence d'une mobilisation de masse. À quoi sert, en effet, d'apprendre le maniement des armes françaises à des gens qui haïssent le pays dont ils détiennent les papiers d'identité ?
En somme, vingt-six ans après la suspension de la conscription, aucun problème n'est réglé. On en a même ajouté quelques-uns : celui des effectifs ; celui de l'acceptation de la mort au combat par l'opinion publique ; celui de la compréhension du conflit par la nation et même celui de la participation active de l'opinion publique à la guerre, qui se joue dans tous les domaines, y compris au quotidien. Nous vivons une époque intéressante.
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Un vert manteau de mosquées
34 commentaires
bonne analyse de la situation l’ennemi futur est il déja dans nos murs?
Monsieur Floriac, l’état de nos Armées Françaises n’est pas si désespérant, comparé aux autres Armées Européennes. Certes nos généraux sont dans la mouvence, lèche- bottes,mais nos capitaines et nos sous- officiers sont toujours valeureux. Il faut croire pour oser!
La condescendance de M. Floirac à l’égard de l’armée de conscription me paraît aussi excessive que déplacée. Je ne sais pas quels sont ses états de service, mais mes quarante années passées sous l’uniforme – ni dans les appuis, ni dans les soutiens, je précise – m’autorisent à moduler ce jugement péremptoire. Je n’ai eu sous mes ordres que des appelés dont je me plais à souligner la disponibilité, le dévouement et généralement la compétence. Il suffisait qu’ils soient bien commandés.
L’époque des bidasses en folie redevient d’actualité. Lorsque que la France vend un rafale, elle le prélève sur sa propre dotation.
L’exemple de l’Ukraine, montre bien que des civils bien décidés et bien armés peuvent être aussi redoutables que des professionnels tatoués, et Chirac, en supprimant le service Militaire n’a fait que précipiter la déliquescence de notre pays. Les crédits n’ont pas été perdus pour tout le monde : ils ont été absorbés par une administration décentralisée pléthorique et une Education Nationale qui ne s’est pas améliorée pour autant. Difficile de revenir en arrière.
à JLP La mutinerie à eu lieu sur le porte avion Foch à moins que ce soit sur le Clémenceau , l’un ferraillé l’autre vendu au Brésil . Il y eu mutinerie du personnel musulman de pont qui s’est retranché dans la cafétaria du bâtiment , en prenant en otage quelques officiers. Il a fallu faire intervenir des fusiliers marins pour les déloger et libérer les otages. Comme quoi la présence de musulmans au sein de notre armée n’en fait pas des éléments fiables et loyaux
j ai en mon temps fait parti de cette armée 11e DP nous étions alors avec encore des appelés bilan les promotions allaient quasi toutes a ce s gens la car un sergent appelé ne coutait rien apres 3 ans j etais caporal mes amis de la meme classe 2e classe ou 1ere classe inutile de vous dire que peut ont rengagés on se foutait royalement de s engagés il faut que l armée reste de metier