Virginie Joron sur la mosquée de Millî Görüş à Strasbourg : « Tous les élus étaient au courant depuis 2014, tous ont voté le permis de construire »

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À Strasbourg, depuis lundi et le vote en conseil municipal d’une subvention de 2,5 millions d’euros pour la construction de la mosquée de l'organisation islamique Millî Görüş, Eyyub Sultan, la polémique enfle.

Virginie Joron dénonce « la compromission » et l'hypocrisie des élus strasbourgeois par « clientélisme et soumission » avec des « ennemis de la République ».

La municipalité écologiste de Strasbourg est dans la tourmente. Une subvention de deux millions et demi d’euros a été allouée pour la mosquée de la Meinau sous le contrôle de l’association turque Millî Görüş. On imagine que cette décision est combattue par le Rassemblement national.

Oui, bien sûr. Nous étions sur ce sujet en 2017. Cette affaire démontre deux immenses problèmes. Premièrement, le problème de l’entrisme turc. Deuxièmement, la compromission de tous ces élus, et pas uniquement les Verts. Il y a beaucoup d’hypocrisies et de mensonges autour de cette polémique. Tous les élus étaient au courant et tous ont voté le permis de construire en 2014.

Déjà, à l’époque, nous étions vent debout contre ce projet de grande mosquée parce que cette association Millî Görüş est connue, de notoriété publique, comme un mouvement politique ou religieux classé par les services allemands comme fondamentaliste islamiste et, donc, interdit.

Le premier problème est vraiment cette compromission de tous ces élus par incompétence, par clientélisme, par bêtise et par collaboration.

Pour préciser, le maire écologiste de Strasbourg n’est en place que depuis 2020, alors que le chantier, lui, a démarré en 2014. Ce n’est donc pas seulement un problème écologiste mais un problème initié par l’ancienne mairie et les anciens élus.

Elle était dans ce conseil municipal et Roland Ries était son patron. Elle faisait partie du groupe majoritaire, connaissait très bien le sujet et a voté le permis de construire. Le jour où M. Roland Ries est allé poser la première pierre, en octobre 2017, elle savait très bien que son président de groupe faisait partie du projet du Millî Görüş. Elle ne peut pas dire, aujourd’hui, qu’elle ne savait pas. Tous les ans, nous avons l’occasion de questionner le préfet, qui est au courant de toutes les affaires en cours. Dans le journal, il y avait un article très intéressant qui développait le sujet de l’inauguration. Le journaliste avait posé la question suivante : « Va-t-il y avoir une subvention demandée à la ville de Strasbourg ? » Cette question avait déjà été posée avec la première mosquée de Strasbourg. À l’époque, c’était Mme Keller qui avait donné une subvention pour cette mosquée. La réponse était la suivante : « On verra. Pour l’instant, ce n’est pas le sujet. » Les autorités du Millî Görüş souhaitaient une subvention de 1,5 million. À l’époque, M. Ries avait dit que les travaux étaient en cours et qu’il ne rentrerait pas dans ce jeu.

Je me suis donc saisie de ce sujet et, quelques semaines plus tard, j’ai eu l’opportunité de poser des questions au préfet. Au préalable, avant de poser une question, les services de la majorité régionale m’avaient demandé quel serait mon sujet. J’avais dit que ce serait une question autour de la future mosquée. Ce même jour, comme par hasard, il n’y a pas eu de retransmission en direct. Je suis restée deux minutes à lui expliquer ce qu’était le Millî Görüş. Autour de moi, les élus LR ricanaient, soufflaient, chuchotaient et s’énervaient. Je n’ai pas eu de réponse. Ils me disaient juste qu’ils ne savaient rien de cette association. Ces questions étaient pourtant précises et argumentées.

Pour finir, la presse locale n’a pas relayé. Il y a eu une espèce d’omerta. Si cette information n’avait pas refait surface cette semaine, on ne serait pas en train d’en discuter.

Lorsque vous voyez Gérald Darmanin et le préfet d’Alsace vent debout contre le maire de Strasbourg, il y a un problème. Le maire de Strasbourg paie pour des années où les politiques locaux ont fermé les yeux sur cette mosquée.

Oui, tout à fait. Le préfet de 2017 a été mis en place par M. Macron. Mais où étaient-ils, en 2014 et en 2017 ?

Millî Görüş n’est pas uniquement en Alsace. Ils se servent de ce sujet, mais qu’ils aillent plus loin. Le sujet qui va revenir c’est la question du financement de cette subvention. Ils demandent juste des garanties, mais nous ne voulons pas de garanties, nous voulons qu’aucun euro n’aille dans les poches des ennemis de la République. Il faut arrêter cela ! De plus, le droit local ne reconnaît pas ce culte. Il n’y a donc aucune obligation à ce que les collectivités locales versent un euro à ces associations cultuelles. Nous demandons zéro subvention. Pour dissoudre certains groupes, on ne tergiverse pas, on y va. Nous avons clairement des ennemis identifiés. Ces gens ne travaillent pas pour la France mais pour la Turquie et pour Erdoğan. À un moment donné, il faut prendre ses responsabilités.

Virginie Joron
Virginie Joron
Virginie Joron est député français au Parlement européen, membre de la délégation pour les relations avec l’Afghanistan

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