Visite présidentielle en Serbie : non-dits assourdissants et malentendus inquiétants
Première depuis 2001, la récente visite présidentielle française en Serbie, occasion rare de renouer une relation de confiance avec un allié historique, s’est révélée être un acte politique manqué. Les non-dits ont été la source de graves malentendus potentiellement dommageables pour les deux pays.
De tempérament entier et constant, les Serbes n’ont pas, eux, le goût des reniements ni des compromissions. Ils aspirent à rejoindre l’Union européenne, avec laquelle ils partagent une géographie contiguë, une histoire longue et des valeurs profondes ; d’autant que leur adhésion a été liée à l’arrestation de leurs anciens dirigeants, recherchés puis jugés pour crimes de guerre par le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPY). Ils ont cru à cette promesse et ont fait leur part.
Il est utile de se rappeler quelques réalités prégnantes dans l’esprit de ce peuple pétri d’histoire et vibrant de patriotisme :
La décennie suivant la mort de Tito, en 1980, a vu le facteur de risque démographique (nié aveuglément en France) alimenter le processus d’éclatement de l’ancienne fédération. Le déséquilibre croissant des ratios communautaires a alimenté des tensions fratricides.
Le mauvais remodelage politique de la République de Bosnie-Herzégovine (RBiH), issu des accords de Dayton de 1995 (1), a sapé les chances de réconciliation des communautés serbes orthodoxes, croates catholiques et bosniaques musulmanes, toujours au bord de l’affrontement.
En prélude à l’intervention de l’OTAN au Kosovo en 1999, Bill Clinton avait promis unilatéralement l’indépendance aux Kosovars albanophones (2) pour affaiblir la Russie pro-serbe et enfoncer un coin dans la construction européenne. Les Serbes du Kosovo ont, depuis, été violemment chassés de ce nouvel État confetti sans réel potentiel de développement. De son côté, la Croatie a le plus bénéficié de la guerre de 1992-95 ; l’histoire retiendra qu’à l’automne 93, soutenue par les États-Unis et l’ONU, elle a éradiqué la population serbe établie depuis 500 ans dans la région des Krajina (confins) après avoir stoppé l’avancée ottomane.
Dur retournement de l’Histoire, après vingt ans d’aides publiques internationales englouties par un système mafieux de corruption généralisée en RBiH et au Kosovo, ce sont les États musulmans du Golfe qui investissent le plus dans cette tête de pont commerciale, politique et religieuse. Fils de l’ex-président islamiste Alija Izetbegović, l’actuel président de la RBiH a déjà fait allégeance au président nationaliste-islamiste turc Erdoğan, avide de vengeance contre l’Europe : « Je te confie mon pays, c’est à toi de le protéger », lui a-t-il déclaré récemment à Sarajevo.
Dans ce contexte, et face à cette force centrifuge au cœur de l’Europe, Emmanuel Macron ferait bien de modérer ses leçons de morale politique à la Serbie, bastion de l’Europe à qui il enjoint de trouver « le bon compromis avec le Kosovo », l’un de ses ventres mous. Et de faire preuve de réalisme responsable face au processus avancé d’islamisation et de balkanisation de la France.
(1) La cohabitation forcée d’une fédération croato-musulmane et d’une république serbe de Bosnie sous la coupe d’un exécutif tricéphale à présidence annuelle tournante est intenable.
(2) Promesse tenue en 2008 par autoproclamation, non reconnue à ce jour par l’ONU ni par l’Union européenne.
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