Vœux à la presse : Bardella appelle les médias français à la loyauté
Curieux pays dans lequel le leader de l’opposition consacre l’essentiel de ses vœux à la presse à réclamer un traitement médiatique équitable et honnête. À six mois des élections européennes, le président du RN Jordan Bardella, ce 15 janvier à Paris, a tenu à rappeler à la profession ses devoirs.
Reçu en grande pompe dans tous les médias, même si l’accueil n’est pas toujours aussi favorable que pour les représentants du pouvoir, le RN n’a plus besoin d’entretenir la guerre des nerfs qui fut celle de Jean-Marie Le Pen. Il évoque ainsi « le noble métier de journaliste », rappelle le nombre de journalistes tués dans le monde dans l’exercice de leur métier – 45 – dans les « batailles pour le droit à l’information ». La salle où se massent une centaine de porteurs de la carte de presse respire. « Je tiens d’abord à vous redire que je crois dans le rôle éminent qui est le vôtre, celui de la presse dans une démocratie moderne », y compris le rôle « critique » des médias, précise-t-il. À ceux qui pensent le RN totalement « normalisé », les vœux de Bardella montrent que ce n’est pas encore tout à fait cela.
Faire mentir Paul Valéry
Le jeune président tente encore d’apprivoiser un monde hostile, de le rassurer, de prévenir cette profession « pas toujours très agréable à notre égard », dit-il. « Ce sentiment, reconnaissons-le, n’est pas toujours infondé », poursuit Bardella. Il connaît ce « jeu dont nous connaissons et admettons les règles ». C’est dit. « Votre vigilance nous force à être meilleurs », ajoute-t-il devant perches et caméras, non sans rendre hommage à la « juste information, loyale ». Les journalistes ont le droit de le secouer, admet Bardella, « pour peu qu’ils le fassent de manière élégante et professionnelle ». Des précisions qui, encore une fois, en disent long sur l’ambiance dans un pays démocratique : des journalistes se pensent encore procureurs. Patiemment, Bardella jette des ponts. « Politiques et journalistes, nous avons en commun de participer et de faire vivre la démocratie », lance-t-il. Il veut « faire mentir Paul Valéry qui prétendait que "la politique est l’art d’empêcher les gens de se mêler de ce qui les regarde" ».
Comment amadouer, flatter, ne pas brusquer, ni heurter, ni indisposer tout en disant les choses, et notamment ceci : les journalistes, Bardella les souhaite « moins militants et plus informatifs ». Qu’en termes élégants… « Tout le monde y gagnera, dit-il, à commencer par les auditeurs, les téléspectateurs et les lecteurs ». Aucun média n'est cité nommément, mais on suit son regard...
Pourquoi tant d’égards, de précautions, de supplications, presque, vis-à-vis de la profession ? Cela aussi, Bardella l’explique : il craint que la campagne européenne ne déraille dans des duels ultra-techniques ou hors-sol, qu’elle ne décourage le vote le 9 juin prochain. La participation, élément crucial pour le succès du RN, dépend en partie des médias. C’est évident, le RN redoute aussi les basses manœuvres de la Macronie. Bardella souhaite que les journalistes se gardent des « slogans », de la « moraline » et « des phrases toutes faites ». Il compte sur les journalistes pour jouer les arbitres et condamner « l’anti-jeu ».
Se garder des chasses à l'homme
Un exemple ? Bardella revient sur « la manipulation des vœux de Marine Le Pen par le porte-parole de Renaissance » - en référence aux vœux de Loïc Signor qui avait cru malin de faire parler Marine Le Pen en langue russe via l’intelligence artificielle - alors que le même parti avait porté en procession la dramatique loi Avia sur les « fake news ». « Il est loin, le temps de la bienveillance qu’un jeune et sémillant candidat à l’élection présidentielle brandissait en 2017 comme un étendard de modernité », balance Bardella.
Lors de ses vœux, la tête de liste RN aux élections européennes a dessiné en creux les tentations de ses adversaires politiques, mentionnant « le bouillonnement des réseaux sociaux » et appelant à « se garder des surenchères inquisitoriales, des tribunaux médiatiques, des chasses à l’homme toujours malvenues, des généralisations ou des imprécations abusives ». L'expérience du parti parle.
Avant de « faire des élections européennes l’acte I du temps de l’espérance dans lequel nous entendons faire entrer le pays en 2024 », le RN s'attend au pire. Aussitôt, les questions pleuvent. Quelques-unes donnent raison au patron du RN. Comment expliquer que les journalistes de l'émission Quotidien n’ont pas pu entrer dans cette salle et que, ce week-end, Le Monde a été refusé à la porte des vœux d’une députée de la nation ? Via une question, France 2 poursuit une longue enquête hostile dont elle décale régulièrement la parution. On s'enquiert à plusieurs reprises du rôle au RN de Frédéric Chatillon, militant-épouvantail de la gauche. La campagne des européennes promet en effet un drôle de rodéo.
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48 commentaires
C’est en 2002 que j’ai compris que bien des journalistes sont entrés dans la bataille électorale sans retenue, et sans conséquences néfastes pour leur carrière,
La presse peut être une menace pour la démocratie, elle ne l’est pas toujours ,mais dans certaines circonstances .
Hier à Lci, j’ai subi une violente attaque de Bernard Guetta, député reniou et ex rance inter, contre le RN. Il s’étranglait au motif que les électeurs puissent encore veauter pour le RN: Ukraine, Trump, Bolsonaro, Orban etc ont été matraqués.
Bah, Guetta affirmait qu’il fallait renforcer nos liens avec la Turquie le plus moderne et démocratique des pays musulmans, en 2010. Simultanément July affirmait qu’il fallait ajouter de l’Anatolie dans l’Europe à Rtl. Ce dernier s’émerveillait en février 1979 de l’avènement de la République islamiste.
Ca va tanguer!
Toute la grande presse occidentale est, sauf rarissimes exceptions, achetée, et Mr Bardella n’a pas les moyens.
Loyauté envers qui?
Les médias doivent-ils être inféodés à quelqu’un?