Voile islamique : Léaument traite Retailleau de… Taliban !

Capture d'écran
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Dans une vidéo postée sur sa chaîne YouTube le 11 janvier, le député LFI Antoine Léaument traite Bruno Retailleau de Taliban. Rien que ça. Sa démonstration est la suivante :  SI vous interdisez le voile islamique dans l’enseignement supérieur, de deux choses l’une : vous  demandez à une femme de se dévoiler pour continuer ses études ou bien de rester voilée et de les arrêter. Autrement dit, explique-t-il, dans la deuxième hypothèse, en demandant à une femme d’arrêter ses études si elle veut conserver son voile, « vous n’êtes pas très différents finalement de ceux que nous critiquons par exemple en Afghanistan les Taliban ». Donc, en résumé, notre ministre de l’Intérieur - puisque c’est lui, ces derniers jours, qui a suggéré que soit interdit le voile islamique dans l’Enseignement supérieur- Bruno Retailleau est comparable à un taliban, la litote « pas très différent de » établissant en réalité une égalité.

Rappelons que, jusqu’à preuve du contraire, Bruno Retailleau n’obstrue pas les fenêtres des  maisons dans lesquelles vivent des femmes, il ne leur interdit pas de chanter, ni de dire de la poésie, il n’a pas exigé que soit banni le son d’une voix féminine dans les médias, est-il besoin de le dire. Mettre un signe de quasi-égalité insulte les uns, banalise les autres, et surtout minimise ce que vivent les femmes afghanes sous le joug des talibans.

Le raisonnement spécieux s’appelle un syllogisme. Retailleau est aux Talibans ce que Socrate est au chat dans Le Rhinocéros de Ionesco. Tous les talibans édictent des interdictions vestimentaires, Retailleau veut édicter une interdiction vestimentaire dans l’enseignement supérieur, donc Retailleau est un taliban.

Un voile de mariée chrétienne ?

On peut d’ailleurs tirer le fil :  s’opposer au port de la burqa dans l’espace public, au voile islamique à l’école, comme le prévoit déjà la loi, c’est de facto, en toute logique, être aussi un taliban. Refuser les horaires séparés à la piscine, interdire les burkinis, même combat ! Ne pas prévoir de halal à la cantine, c’est aussi empêcher certains enfants de se nourrir : tortionnaires, en plus d’être talibans !

Le chat de Socrate est un subterfuge souvent utilisé par LFI en matière de voile islamique : Éric Coquerel avait ainsi comparé, en 2021, le voile islamique à un voile de, je cite, « mariée chrétienne » : tous les voiles de mariée se mettent sur la tête, le voile islamique se met sur la tête, donc le voile de mariée est un voile islamique, c’est logique ! En fait de chat, c’était tout un tas de mariées, d’hier et d’aujourd’hui, qui avaient sorti les griffes, courroucées de voir leur jolie cascade de tulle immaculée ainsi dénigrée. Sur X, Eric Coquerel avait reçu, en représailles, un tsunami de photos de noces diverses et variées, histoire qu’il puisse bien comparer.

Coquerel n’est pas un aigle !

Déjà à l’époque, étaient visés les députés Éric Ciotti et Anne Genevrard, LR, qui plaidaient pour l’interdiction du voile islamique à l’université (et pour les accompagnatrices scolaires). Est-ce que vous allez l’interdire ? Hein, est-ce que vous allez l’interdire, ce voile de mariée ?  Eric Coquerel, tout content de sa comparaison spécieuse, sautait comme un cabri sur Twitter. On peut, de fait, partager pour une fois son avis :  le voile de mariée, à la fac, ce n’est pas très commode :  encombrant dans l’amphi, on peut se prendre les pieds dedans, marcher sur la traîne, faire tomber le diadème, tout cela était évidemment parfaitement absurde. Si Socrate est un chat, Coquerel n’est pas un aigle !

On peut citer encore - l’inventivité de LFI étant comme son idéologie, sans frontières -, le serre-tête d’Aurélien Taché ou, plus récemment, - copyright, cette fois, de Raphaël Arnault - le rouge à lèvres : quel point commun, je vous le demande avec le hijab, le maquillage ne couvrant pas le chef ? « L’embellissement », sans doute. Car c’est ainsi que Sandrine Rousseau voit le voile islamique : un potentiel embellissement. Une remarque qui lui a valu d’être sifflée à une manifestation d’iraniennes.

À quand le vernis à ongle, la barrette dans les cheveux, l'eye liner ? L’immense catalogue volant au secours du hijab ressemble à un magasin Sephora. Jamais nos politiques n’auront autant parlé «  chiffon ».

Mais pourquoi une telle obsession à défendre le voile ? La chercheuse du CNRS Florence Bergeaud-Blackler, auteur du Frérisme est ses réseaux, l’enquête, chez Odile Jacob, l’a expliqué ce week-end sur BV : «  Pas de voilement, pas de société islamique » : « s’attaquer au voile, c’est s’attaquer à la structure même de la société islamique, et donc l’empêcher ».

« Connais-toi toi-même », disait Socrate, et le petit chat du syllogisme est mort. Léaument traite Retailleau de Taliban. Comme disent les enfants, c’est celui qui dit qui l'est !

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Gabrielle Cluzel
Directrice de la rédaction de BV, éditorialiste

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