Zimbabwe : les habits de la démocratie
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Un de mes amis ex-fermier violemment expulsé de sa ferme, il y a quelques années, est aujourd’hui un observateur attentif de la vie politique du Zimbabwe. Arrivé il y a cinquante ans dans ce qui était encore la Rhodésie, il a, malgré ce qu’il a subi comme violence, l’amour de ce pays chevillé au corps. Il a eu la résilience nécessaire pour se reconstruire dans un autre secteur d’activité. Voici son témoignage.
Ces dernières élections ont été, en apparence, les plus démocratiques de toutes les parodies électorales orchestrées depuis 1980 par l’ex-président Mugabe. Le nouvel homme fort Emerson Mnangagwa était attendu au virage par les observateurs internationaux venus juger sur place de la rupture annoncé par lui.
Les élections législatives semblent avoir été gagnées par le ZANU/PF de façon plus ou moins légale, ce parti remportant les deux tiers des sièges à l’Assemblée nationale. Le MDC, principal parti d’opposition, n’a pas eu l’organisation nécessaire sur le terrain pour mieux faire que les 64 sièges qu’il a récoltés, contre 49 auparavant.
Mais dans ce pays, où la présidence a exercé une prédominance sur la vie politique depuis 1980, c’est surtout le scrutin présidentiel qui retenait l’attention. Notre ami ex-fermier me faisait remarquer que Staline avait dit, en 1930, que "ce n’est pas celui qui vote qui compte, mais celui qui dépouille les votes..." Mugabe est parti mais ses méthodes planent encore sur la vie de ce pays à travers la nomenklatura toujours en poste aux principaux leviers de l’État.
La faiblesse de la représentation de l’opposition dans les bureaux de vote ruraux a fait que les décomptes communiqués à la ZEC (Zimbabwe Electoral Commission) ont été pris pour argent comptant par cet organisme chargé de déclarer les résultats du vote, qui donnent 50,8 % pour Mnangagwa, contre 44 % pour Chamisa. Obsédés par les violences préélectorales passées, les observateurs semblent, surtout, avoir été conquis par le calme qui a précédé la consultation. Mais celle-ci a immédiatement débouché sur une répression musclée lorsque Nelson Chamisa, leader de l’opposition, a tenu une conférence de presse pour dénoncer les irrégularités qui lui sont parvenues avec un certain décalage. La police, armée de bâtons, a essayé d’expulser les journalistes de l’hôtel où se tenait cette conférence de presse. Ces derniers ont finalement eu gain de cause et ont pu entendre Nelson Chamisa discourir sur l’illégalité du scrutin et les fraudes dont il a les preuves. Il prétend avoir remporté l’élection avec 56 %, contre 44 % pour son adversaire.
Les jours à venir nous diront si, oui ou non, le remplacement de Mugabe à la présidence par Emerson Mnangagwa n’a été, comme certains le pensent, qu’un savant toilettage...
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