9 mars 1749 : naissance de Mirabeau, vive la Révolution et vive le roi !

Mirabeau jouera un double jeu, illustrant la complexité des événements qui ont bouleversé la France à la fin du XVIIIe.
Mirabeau

Le 9 mars 1749 naissait Honoré-Gabriel Riqueti, plus connu sous son titre de comte de Mirabeau. Figure flamboyante de la Révolution française et orateur hors pair, il incarnera à la fois la ferveur révolutionnaire et les contradictions de cette époque troublée. Tantôt ardent défenseur des idées nouvelles, tantôt conseiller secret de Louis XVI, Mirabeau jouera ainsi un double jeu qui illustre la complexité des événements politiques qui ont bouleversé la France à la fin du XVIIIe siècle.

Une jeunesse tumultueuse

Issu d’une illustre famille de Provence, Mirabeau grandit sous l’autorité écrasante de son père, le marquis de Mirabeau, un économiste et philosophe rigide. Doté d’un tempérament fougueux et d’un esprit indomptable, le jeune Honoré s’oppose sans cesse à cette figure paternelle austère. Refusant ainsi de se soumettre, il mène une jeunesse libertine et scandaleuse, accumulant dettes, liaisons tumultueuses et procès. Séducteur insatiable, joueur invétéré et pamphlétaire redouté, il est emprisonné à plusieurs reprises sur lettre de cachet. Mais loin de se laisser abattre, il profite de ces séjours forcés derrière les barreaux pour affûter sa plume. En captivité, il rédige ainsi des ouvrages virulents contre l’arbitraire royal et s’impose comme une voix contestataire avant même la Révolution.

L’orateur du peuple

Lorsque Louis XVI convoque les États généraux en 1789, Mirabeau rompt avec son milieu aristocratique et parvient à se faire élire député du tiers état. Très vite, il s’impose comme un véritable tribun, capable d’embraser et de galvaniser ceux qui l’écoutent par ses discours enflammés.

Lorsque le tiers état se proclame Assemblée nationale et appelle les deux autres ordres à le rejoindre, le roi tente de briser leur élan rebelle en fermant la salle des Menus-Plaisirs à Versailles. Mais les députés avec Mirabeau résistent et se rassemblent dans la salle du Jeu de Paume, jurant « de ne jamais [se] séparer et de se rassembler partout où les circonstances l'exigeront, jusqu'au jour où la constitution du royaume sera établie et affermie sur des fondements solides ». Le 23 juin 1789, Louis XVI exige la dissolution définitive de cette Assemblée illicite. Lorsque le marquis de Dreux-Brézé, maître de cérémonie du roi, vient rappeler à nouveau les volontés de son monarque en disant à Jean Sylvain Bailly, le président de l'Assemblée nationale : « Monsieur, vous avez entendu les intentions du roi ! », Mirabeau se lève soudain et tonne d’une voix puissante : « Allez dire à ceux qui vous envoient que nous sommes ici par la volonté du peuple et que nous ne quitterons nos places que par la force des baïonnettes ! » Dès lors, il devient l’un des piliers de la Révolution, jouant un rôle clé dans la transformation des États généraux en Assemblée nationale constituante et précipitant la chute de l’Ancien Régime.

Un homme à double face

Malgré son engagement révolutionnaire, Mirabeau n’est pourtant pas un vrai républicain. Convaincu que la monarchie constitutionnelle est la meilleure issue pour la France, il entre secrètement en contact avec Louis XVI et Marie-Antoinette, voyant là une aubaine politique et financière. Convaincu qu’une monarchie constitutionnelle bien dirigée est préférable au chaos qui s’annonce, il décide de louer ses services au roi comme conseiller occulte. Contre d’importantes sommes d’argent, il adresse ainsi au monarque des mémoires détaillés où il propose des réformes et des stratégies pour restaurer l’autorité royale tout en respectant les acquis de la Révolution. Son but n’est pas de renverser la Révolution mais de la canaliser pour éviter le chaos qui se profile. Pourtant, sa position est intenable : pour les révolutionnaires radicaux, son passé aristocratique et sa proximité avec la Cour le rendent suspect ; pour la noblesse et la famille royale, il reste un homme à la réputation sulfureuse et compromis avec l’ennemi.

La postérité d’un homme paradoxal

Mirabeau meurt prématurément le 2 avril 1791, à l’âge de 42 ans, épuisé par une vie de libertin et d’intrigues. Son décès est alors un choc pour les révolutionnaires, qui le pleurent comme l’un de leurs plus puissants tribuns. En hommage à son combat, il est inhumé au Panthéon en héros de la Révolution. Mais en 1792, la découverte de l’armoire de fer, où Louis XVI cachait sa correspondance secrète, révèle au grand jour son double jeu. Accusé de trahison posthume, Mirabeau est violemment désavoué : son corps est exhumé du Panthéon et remplacé par celui de Marat. Renié par tous, il illustre à lui seul cette phrase de Vergniaud : « La Révolution est comme Saturne : elle dévore ses enfants. »

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Eric de Mascureau
Chroniqueur à BV, licence d'histoire-patrimoine, master d'histoire de l'art

Vos commentaires

8 commentaires

  1. Il n’était pas bon à cette époque de sortir du raisonnement binaire : la royauté c’est le mal , la république c’est le bien !
    La franc-maçonnerie mondialiste était déjà à l’œuvre avec probablement d’autres forces qui régissent le monde d’aujourd’hui.
    Mirabeau, à mes yeux, ne jouait pas le double jeu mais comprenait bien les enjeux. Aujourd’hui ce sont les mêmes « ressorts » qui sont utilisés : Droite vs Gauche, démocrates vs républicains, Laïcité / religion. Si nous n’élevons pas le débat au niveau de la domination du monde et par qui ; nous serons toujours à la merci de ces mêmes forces qui détruisent les états nations tels que la France à leur seul profit !

  2. « la complexité des événements politiques qui ont bouleversé la France à la fin du XVIIIe siècle. » Aucune complexité. Prise du pouvoir grâce aux armes par une pègre dont l’uniforme était l’absence de culotte et l’occupation préférée la beuverie de sang.

  3. Heureusement pour lui qu’il a été rattrapé par la maladie. Sans cela il aurait fini sur la guillotine. La révolution l’aurait mangé , comme elle a mangé tous ses enfants de Danton à Robespierre en passant par St Just, Philippe Egalité et les autres. « Qui sème le vent récolte la tempête… ».

  4. Ceux qui adulent la révolution nous parlent de l’abolition des privilèges ! Et ils n’ont pas l’impression de nous prendre pour des demeurés ? Depuis la révolution, au contraire, il me semble que les privilèges, mais aussi le nombre des privilégiés, ont augmentés comme les surmulots à Paris.

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